Métropole et colonies
THEME 3 :
LA TROISIEME REPUBLIQUE AVANT 1814 : UN REGIME POLITIQUE, UN EMPIRE COLONIAL
Votre mission : Dans le cadre d'un travail par équipes, vous êtes chargés de réaliser une exposition sur le thème Métropole et colonies (1870-1914) sous l'une des trois formes suivantes :
  • un livret d'exposition
  • une exposition au CDI
  • une exposition virtuelle
Pour mener à bien cette mission, votre premier travail consiste à vous approprier le sujet en lui-même. Ci-dessous, vous trouverez 11 corpus thématiques portant sur la question. Au sein de chaque groupe, répartissez-vous les corpus et répondez à l'ensemble des questions.

Saïgon, ville coloniale

1) Relevez les marques de la présence française dans le paysage urbain. Comment voit-on que la ville a été remaniée par le colonisateur ?

2) Expliquez quel monument est placé au centre de Saïgon et les raisons de ce choix.

3) Quelles fonctions urbaines font de Saïgon une capitale coloniale ?

4) Analysez la place réservée aux populations indigènes dans la ville coloniale.

5) A l’époque coloniale, Saïgon est qualifiée de « perle de l’Extrême-Orient ». Expliquez ce terme et montrez qu’il n’est qu’en partie justifié.

Une capitale économique et politique
Plan de Saïgon à la fin du XIXème siècle
Capitale de l'Union indochinoise à partir de 1887, Saigon est aussi le principal port de ce territoire et la « perle de l'Extrême-Orient » pour l'empire français.
 
Le plan de Saïgon en 1900
 
Une ségrégation urbaine très marquée
Saïgon, vue aérienne de l'arroyo chinois et de la rivière de Saïgon, 1932
Les quartiers annamites sont situés en périphérie. Celui de Cholon, le long de l'arroyo (ruisseau) chinois, est le prolongement commercial de Saigon. Il compte en 1900 près de 80 000 habitants.
 
Une vitrine de la culture française
Saïgon, le théâtre municipal, carte postale, vers 1905
Achevé en 1899, le troisième théâtre européen construit à Saigon s'inspire de l'architecture du Petit Palais, à Paris. Il accueille régulièrement des troupes venues de France.
 
La vie à Saïgon, capitale de l'Indochine française
Mise en garde : le site vous propose une analyse qui va au-delà du cadre chronologique de votre étude
Original link
Les colons
Arrivée du courrier venant de France

 
La rue de Catana
 
Une ville française sous les tropiques
Victoire de l'urbanisme colonial sur la nature tropicale, Saigon déçoit ses visiteurs métropolitains par son manque d'exotisme.
« Saigon, “Paris de l'Extrême-Orient” ressemble assez comme aspect général au beau parc de Neuilly […]. La statue en bronze du grand tribun Gambetta s'érige sur ce même boulevard [le boulevard Norodom] que barre, un peu plus loin, le palais du gouverneur général […]. On a voulu faire grand et montrer, par-là, la puissance de la France. […] Avant d'arriver au port de commerce qui limite le boulevard, nous rencontrons, toujours sur la droite, le marché indigène. […] On y rencontre surtout l'Annamite et le Chinois, un certain nombre de Malais, d'Indiens et de Birmans. La proximité du quartier chinois donne à cette partie de Saigon un caractère exotique qui lui manque dans beaucoup d'autres endroits. […] Malheureusement, ceux que la maladie oblige au séjour dans le bel hôpital ont trop peu souvent l'occasion d'en vanter les douceurs ; la porte dérobée qui s'ouvre derrière les pavillons […] laisse passer journellement les victimes du climat meurtrier. […] Les beaux magasins et les grands cafés à l'instar de Paris ne manquent pas dans la rue Catinat, centre du commerce et des affaires de la capitale cochinchinoise.»
Fred Abaly, Notes et souvenirs d'un ancien marsouin, Cochinchine-Cambodge, 1910.
Saïgon coloniale
C'était une nuit de Saigon, étincelante d'étoiles, chaude comme un jour d'été occidental (…). La rue ressemblait à une allée, à cause des arbres entrelacés en voute et des globes électriques suspendus dans le feuillage - à cause aussi du silence et de la solitude ; car Saigon, capitale médiocre, fait tout son tapage nocturne dans une seule rue centrale, la rue Catinat - et dans un petit nombre d'autres lieux plus discrets, que les honnêtes gens prétendent ignorer.
Rue Catinat, c'est l'agitation mondaine, correcte - et quand même admirablement libre et impudente, parce que la loi souveraine du pays et du climat prime sur les mœurs importées. Dans le jour cru des réverbères électriques, entre les maisons à véranda masquées de verdure et de jardins, une cohue bariolée passe et repasse, seulement occupée de son plaisir. Il y a des gens de tous les pays : Européens, Français sur tout, coudoyant l’indigène avec une insolence bienveillante de conquérants ; et Françaises en robe du soir, promenant lentement leurs épaules sur la convoitise des hommes ; Asiatiques de toute l'Asie, Chinois du Nord, grands, glabres et vêtus de soie bleue ; Chinois du Sud, petits, jaunes et vifs ; Malabars, rapaces et câlins ; Siamois, Cambodgien, Moïs, Laotiens, Tonkinois ; Annamites, enfin, hommes et femmes tellement pareils qu'on s'y trompe tout d'abord, et que bientôt on fait semblant de s'y tromper.
Claude Farrère, Les Civilisés, 1905 (prix Goncourt)
Derrière la vitrine coloniale, les désillusions
L'auteur, polémiste célèbre, critique ici l'image, portée par la propagande, d'un eldorado colonial.
« Car derrière les riches apparences, que les observateurs ont données comme de l'or pur, que de réalités moins brillantes. […] Saigon n'est pas française que par sa coquetterie, son luxe, sa fougue au plaisir, sa verve intrépide. Saigon est bien française par tant de traits encore… Ne croyez pas à l'universelle bombance (1) ! Tout le monde n'a pas sa voiture – et l'on se surveille au café où les consommations coûtent deux à trois fois plus cher qu'à Toulouse ou qu'à Paris. Or, s'il y a d'enviable prébendes (2), c'est en nombre limité, et les soldes coloniales, même doubles du traitement européen, n'autorisent ici qu'une vie de stricte économie. Passe pour les célibataires, qui se tirent plus aisément d'affaire. […] Mais la difficulté est permanente dans les ménages. Que d'illusions il a fallu rayer, que tout était pour rien, le loyer, le boy et la volaille ! Les logements sont d'un prix inaccessible, à tant de Français, expatriés dans l'espoir de la “vie libre et large des colonies” – réduits à se confiner dans […] des chambres […] semblables à des souricières… »
Jean Ajalbert, Les destinées de l'Indochine, 1909.
(1) Repas copieux
(2) Poste honorifique obtenu par faveur