Métropole et colonies
THEME 3 :
LA TROISIEME REPUBLIQUE AVANT 1814 : UN REGIME POLITIQUE, UN EMPIRE COLONIAL
Votre mission : Dans le cadre d'un travail par équipes, vous êtes chargés de réaliser une exposition sur le thème Métropole et colonies (1870-1914) sous l'une des trois formes suivantes :
  • un livret d'exposition
  • une exposition au CDI
  • une exposition virtuelle
Pour mener à bien cette mission, votre premier travail consiste à vous approprier le sujet en lui-même. Ci-dessous, vous trouverez 11 corpus thématiques portant sur la question. Au sein de chaque groupe, répartissez-vous les corpus et répondez à l'ensemble des questions.
L'expansion coloniale

1) Quels sont les territoires sous domination française en 1870 ? Quels sont les territoires intégrés à l'empire colonial français entre 1870 et 1914?
2) Quels sont les arguments avancés pour justifier la conquête coloniale ?
3) La conquête coloniale est-elle unanimement acceptée en France ? Justifiez votre réponse.
4) Quelles sont les différentes formes que prennent les conquêtes coloniales françaises ?
5) Quels sont les différents statuts accordés aux territoires conquis ? Quelles en sont les principales caractéristiques ?

Jules Ferry justifie la colonisation
Le républicain opportuniste* Jules Ferry, dont le gouvernement a été renversé en mars 1885, cherche à convaincre les députés de voter de nouveaux crédits coloniaux.
« Sur le terrain économique, je me suis permis de placer devant vous […] les considérations qui justifient la politique d'expansion coloniale […] : le besoin de débouchés.
Messieurs, il y a un second point […] que je dois également aborder […] : c'est le côté humanitaire et civilisateur de la question. Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu'en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures […] Je répète qu'il y a pour les races supérieures un droit, parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures […]
Un troisième ; plus délicat ; […] c'est le côté politique de la question. […] Messieurs, dans l'Europe telle qu'elle s'est faite, dans cette concurrence de tant de rivaux […] rayonner sans agir, sans se mêler aux affaires du monde, […] en regardant comme un piège, comme une aventure, toute expansion vers l'Afrique ou vers l'Orient, […] c'est abdiquer, et, dans un temps plus court que vous ne pouvez le croire, c'est descendre du premier rang au troisième ou au quatrième. »
Jules Ferry, Discours devant la Chambre des députés, 28 juillet 1885.
Les empires coloniaux en 1914
 
Les Empires coloniaux en 1870
 

Un colonisateur idéaliste ?

Restez en contact constant avec les Noirs. Payez leurs services, achetez leurs vivres, écoutez leurs doléances. Et forcez-vous à comprendre non seulement les mots qu'ils prononcent mais aussi leur mentalité. Étudiez leurs aptitudes, mêlez-vous à leur vie. Dans vos moments perdus, visitez leurs villages, interrogez femmes et enfants, couchez chez eux. Explorez la contrée avoisinante. Pas d'armes, pas d'escorte. Allez seul, accompagné d'un interprète et d’un boy si besoin. N'oubliez pas que vous êtes un intrus qu'on n'a pas appelé.

Note de Brazza à son adjoint Alfred Fourneau, vers 1886

Georges Clemenceau répond à Jules Ferry

Ah ! Si vous voulez des débouchés, cherchez dans cette voie du bon marché de la fabrication et du bas prix des transports. Or, lorsque vous dépensez une centaine de millions en expéditions guerrières, vous ne faites que charger le budget, grever le travail, diminuer le pouvoir d'achat du salaire ; vous augmentez les prix de la fabrication (…). Le travail est grevé par vos impôts de consommation (…).

Races supérieures, races inférieures, c'est bientôt dit ! Pour ma part, j'en rabats singulièrement depuis que j'ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande parce que le Français est d'une race inférieure à l’Allemand (…). Je ne veux pas juger au fond la thèse qui a été rapportée ici et qui n'est pas autre chose que la proclamation de la puissance de la force sur le droit (…). Mais n'essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation (…). Mais nous dirons, nous, que lorsqu'une nation a éprouvé de graves, très graves revers en Europe, lorsque sa frontière a été entamée, il convient peut-être, avant de la lancer dans des conquêtes lointaines (…) de bien s'assurer qu'on a le pied solide chez soi.

Discours de Georges Clemenceau à la Chambre des députés, 30 juillet 1885

Savorgnan de Brazza négocie avec le Makoko, roi des Batékés

« Exploration de M. de Brazza 1875-1879. Son traité avec Makoko », Les colonies françaises, cahier n°26, 1892

 
La colonisation vue par Victor Hugo
La Méditerranée est un lac de civilisation ; ce n'est certes pas pour rien que la Méditerranée a sur l'un de ses bords le vieil univers et sur l'autre l'univers ignoré, c'est-à-dire d'un côté toute la civilisation et de l'autre toute la barbarie (...).
Déjà les deux peuples colonisateurs, qui sont deux grands peuples libres, la France et l'Angleterre, ont saisi l'Afrique ; la France la tient par l'ouest et par le nord ; l'Angleterre la tient par l'est et par le midi. Voici que l'Italie accepte sa part de ce travail colossal (...)
Allez, Peuples ! Emparez-vous de cette terre. Prenez-la. A qui ? A personne. Prenez cette terre à Dieu. Dieu donne la terre aux hommes, Dieu offre l'Afrique à l'Europe. Prenez-la. Où les rois apporteraient la guerre, apportez la concorde. Prenez-la, non pour le canon, mais pour la charrue ; non pour le sabre, mais pour le commerce ; non pour la bataille, mais pour l'industrie ; non pour la conquête mais pour la fraternité (...). Allez, faites ! Faites des routes, faites des ports, faites des villes ; croissez, cultivez, colonisez, multipliez ; et que, sur cette terre, de plus en plus dégagée des prêtres et des princes, l'Esprit divin s'affirme par la paix et l'Esprit humain par la liberté !
Victor Hugo, Discours sur l'Afrique, prononcé le 18 mai 1879 lors du banquet commémoratif de l'abolition de l'esclavage.

La résistance à Madagascar

En 1894, la reine Ranavalona III refuse le protectorat français.En 1896, un corps expéditionnaire français,dirigé par le général Gallieni,s'empare de Madagascar qui devient une colonie. La capitale tombe mais les villages alentour refusent l'autorité française.

Des actions de répression dans l’Imerina (1) eurent lieu le 5 mars 1896 : 4 unités mobiles de la compagnie Thévenin devaient cerner Manaritsoa qu’on prétendait être le refuge d'une bande de rebelles. Après le cessez-le-feu, on continua à tirer et de charger à la baïonnette. La répression fut impitoyable (..).

En novembre, je partis à Ambatomanga. Les abords du village étaient jalonnés de piquets surmontés de têtes. Les exécutions se faisaient presque journellement. De fait, il n'arrivait à Ambatomanga que des gens qu’on prenait, soi-disant, les armes à la main, et à qui on coupait la tête, sans interrogatoire et sans aucune forme de procès (…). Maintenant, on voyait dans tout le pays en insurrection, des chefs de bande entraînant la population.

Calixte Savaron, Mes souvenirs à Madagascar, avant et après la conquête, 1885-1898

Violence et conquêtes
La prise de Lang Son le 13 février 1885, image d’Épinal, 1885
La colonisation se fait dans la violence, au détriment des populations locales. Entre 1881 et 1885, la France conquiert ainsi une grande partie de la péninsule indochinoise
 

Une convention de protectoratimposée au roi du Cambodge (1884)

Art. 1er - Sa Majesté le roi du Cambodge accepte toutes les réformes administratives, judiciaires, financières et commerciales, auxquelles le gouvernement de la République française jugera, à l'avenir, utile de procéder pour l'accomplissement de son protectorat.

Art. 2 - Sa Majesté le roi du Cambodge continuera, comme par le passé, à gouverner ses Etats et à diriger leur administration, sauf les restrictions qui résultent de la présente convention.

Art. 3 - Les fonctionnaires cambodgiens continueront, sous le contrôle des autorités françaises, à administrer les provinces, sauf en ce qui concerne l'établissement et la perception des impôts, les douanes, les contributions indirectes, les travaux publics et, en général, les services qui exigent une direction unique et l'emploi d'ingénieur d'agents européens (…).

Art. 8 - L'esclavage est aboli sur tout le territoire du Cambodge.

Repris dans le recueil des actes du gouvernement cambodgien, Saigon, 1920

L'impérialisme en 1914
 

Colonies d'exploitation et colonies de peuplement

Il y a 2 catégories principales de colonies, lesquelles se distinguent par des caractères très tranchées : les colonies d'exploitation (…), les colonies de peuplement (…) .Dans les premières, le peuple colonisateur apporte seulement ses capitaux, sa direction politique et économique ; il ne cherche pas à remplacer la race indigène par une immigration de ses propres nationaux ; il respecte et conserve, autant que possible, l'organisation sociale des natifs. Dans la seconde catégorie de colonies, au contraire, le peuple colonisateur cherche surtout à implanter sa race, à créer une société analogue ou même identique à celle de la mère patrie ; il absorbe toute la vie économique du pays, il s’approprie les terres et peu à peu il évince complètement les natifs qui d'ailleurs dans ce genre d'établissement sont peu nombreux, clairsemés et n’ont qu’un embryon de civilisation.
Paul Leroy-Beaulieu, De la colonisation chez les peuples modernes, 1874