La  vie  est  différente  en  France  suivant  la  zone  dans  laquelle  on  vit  jusqu’à  la  fin  de  l’année  1942.  En zone  occupée,  la  présence  allemande  modifie  l’ambiance  des  villes  qui  se  couvrent  de  panneaux  en allemand et de drapeaux nazis, tandis que l’horaire des Français est aligné sur le méridien qui passe à Berlin. Le couvre-feu restreint les sorties du soir et le dernier métro passe à minuit moins le quart. En revanche, l’obsession commune à tous les Français, c’est la faim et le froid. En effet, le pillage allemand provoque  de  fortes  restrictions  et  l’absence  des  Français  retenus  comme  prisonniers  de  guerre  en Allemagne désorganise  considérablement  la  production  économique.  Les  cartes  de  rationnement  sont instaurées à partir de l’automne 1940 suivant un système qui fournit de1 200 à 1 800 calories par jour et par personne, selon l’âge, les activités et le lieu de résidence : huit catégories ont été fixées. À Paris, avec ses tickets de rationnement, un adulte peut acheter 275 grammes de pain par jour. Par semaine, il peut  acquérir  350  grammes  de  viande  avec  os,  100  grammes  de  matières  grasses  et  70  grammes  de fromage.  Par mois,  ses  tickets  lui  donnent  droit  à  200  grammes  de  riz,  500 grammes  de  sucre  et  250 grammes  de  pâtes.  Tout  ceci  à  condition  que  les  produits  ne  manquent  pas.  Les  Français  élèvent  des lapins  et  des  poules,  accommodent  les  rutabagas  et  les  topinambours  comme  ils  le  peuvent,  et  sont attentifs à ramasser le moindre mégot. Les bas étant devenus introuvables, les femmes se peignent les jambes, poussant le réalisme jusqu’à dessiner la couture du bas. Par manque d’essence – réquisitionnée pour  les  véhicules  allemands –,  les  voitures  fonctionnent  au  charbon  de  bois  grâce  au  gazogène,  un appareil  simple  à  fabriquer,  avec  des  matériaux  faciles  à  se  procurer,  et  qui  produit  un  gaz  pauvre permettant d’alimenter les moteurs. Les semelles de bois ou de liège remplacent le cuir. Tout est soumis au rationnement, le tabac, la laine... Les Français souffrent de la faim, de la malnutrition et tombent plus facilement malades: le nombre de morts dues à la tuberculose double. Les carences alimentaires ou en vitamines  que  subissent  les  enfants  affectent  leur  croissance.  Les  queues  s’allongent  quotidiennement devant  les  magasins  et  les  épiciers,  dont les boutiques sont vides  mais les arrière-boutiques souvent pleines, en profitent. Pour s’en sortir, les Français pratiquent le marché noir, strictement interdit :dans les rapports de gendarmerie, ce délit figure dans la rubrique « Agissements nuisibles au relèvement du pays ».  Les  Français  qui  s’y  livrent  achètent  au  prix  fort,  sans  ticket  de  rationnement,  les  aliments  qui manquent  le plus  comme  le  beurre,  le  café,  les  fruits  ou  la  viande.  Mais  tous  n’ont  pas  les  moyens nécessaires pour profiter de ce trafic, d’autant que les prix ont connu une hausse considérable. Ainsi, le kilo d’épinards qui était à 2,50 francs en 1940 s’élève à 10 francs l’année suivante dans la ville de Tours. Les allers et retours sont alors fréquents pour trouver du ravitaillement dans les familles qui vivent à la campagne. En effet, si les villes  souffrent  de  la  faim,  les campagnes, elles, ont accès à une alimentation suffisante et variée.   De plus, d’un département à l’autre, les produits circulent mal. La ration quotidienne moyenne est alors estimée à 1 500 calories, et assurément moins en  ville. À titre de comparaison, un rapport de l’OCDE daté de 2005 estime la consommation actuelle moyenne en France à 3 654 calories. Pendant la  guerre,  les Français souffrent également du froid, d’autant que les hivers sont rigoureux, surtout en 1940-1941.