Votre analyse devra comprendre plusieurs aspects, conformément à la méthode de l’analyse de document :
Le destin des détenus qui ne sont pas gazés
Primo Lévi, chimiste italien juif et résistant, est déporté à Auschwitz en 1944. Il est affecté au camp de Monowitz, le camp de travail du complexe d’Auschwitz.
Ici, tout le monde travaille, sauf les malades (…). En ce qui concerne le travail proprement dit, nous sommes répartis en 200 kommandos environ, dont chacun peut aller de 15 à 150 hommes commandés par un kapo (1). Il y a les bons et les mauvais kommandos : la plupart sont affectés au transport de matériel, et le travail y est dur, notamment l’hiver, ne fût-ce que parce qu’ils sont en plein air (…).
Au bout de 15 jours de lager [camp], je connais déjà la faim réglementaire, cette faim chronique que les hommes libres ne connaissent pas, qui fait rêver la nuit et s’installe dans toutes les parties de notre corps (…). Déjà sont apparues sur mes pieds les plaies infectieuses qui ne guériront pas. Je pousse des wagons, je manie la pelle, je fonds sous la pluie et je tremble dans le vent. Déjà mon corps n’est plus mon corps, j’ai le ventre enflé, les membres desséchés, le visage bouffi le matin et creusé le soir ; chez certains, la peau est devenue jaune, chez d’autres, grise ; quand nous restons 3 ou 4 jours sans nous voir, nous avons du mal à nous reconnaitre.
Primo Levi, Si c’est un homme, Julliard, 1987 (1ère publication : 1947)
1. Détenu responsable d’un kommando de travail. Il a droit de vie et de mort sur les détenus et bénéficie de privilèges.
Si la volonté d’exclure et de chasser les Juifs du Reich existe dès 1933, c’est dans la seconde partie de l’année 1941 que les principaux dirigeants du régime, Göring, maréchal du Reich et ministre de l’Air, Himmler, chef de la SS et de la Police, Heydrich, directeur de l’Office central de la sécurité du Reich (RSHA) et Hitler lui-même, décident de procéder, sous le nom de « Solution finale », à la liquidation physique de tous les Juifs du continent européen.
Les opérations de tueries menées par les Einsatzgruppen n’ étant pas jugées assez rapides, ou étant considérées comme trop éprouvantes pour les bourreaux et difficilement généralisables à toute l’Europe, les nazis mettent sur pied à Chelmno, près de Lodz,un premier centre de mise à mort par camion à gaz, inspiré par « le programme d’élimination des malades mentaux » (programme T4) mené en Allemagne et en Pologne de 1939 à 1941.
Le 20 janvier 1942, dans une villa réquisitionnée dans la banlieue de Berlin, au bord du lac de Wannsee, une réunion est organisée par Reinhard Heydrich à laquelle prennent part quinze hauts fonctionnaires du Parti nazi et de l’administration allemande. La conférence qui ne dure qu’une heure trente, porte sur la coordination de la déportation des Juifs d’Europe de l’ouest mais surtout sur la question du rôle directeur de la SS, et plus particulièrement du RSHA, dans la mise en œuvre de la « Solution finale de la question juive » que tous les participants entérinent sans soulever d’opposition.
Au moment de la conférence, la plupart des personnes présentes ont déjà conscience ou connaissance du processus d’extermination mis en œuvre. Les meurtres de masse de Juifs perpétrés par les Einsatzgruppen ont commencé depuis plus de six mois et le premier convoi en provenance de la région de Lodz est arrivé à Chelmno le 7 décembre 1941.
Le compte-rendu de la réunion est rédigé en trente exemplaires dont un a été retrouvé après la guerre au ministère des Affaires étrangères. La conférence de Wannsee reste le symbole du caractère bureaucratique d’une grande partie de la Shoah.
Source memorial de la shoah