L'industrialisation et l'accélération des transformations économiques et sociales
THEME 2 :
LA FRANCE DANS L'EUROPE DES NATIONALITES : POLITIQUE ET SOCIETE (1848-1870)
A l'aide des corpus documentaires suivants :
- Répondez aux questions de votre groupe
- Réalisez une carte mentale pour présenter les conclusions de votre travail
Le poids du monde rural


population totale
(milliers)
population rurale
(milliers)
population rurale
(en %)
population active
agricole (en %)
population active
industrielle (en %)
population active
tertiaire (en %)
1846
35 203
26 764
76
57,9
24,6
17,5
1851
35 783
26 647
74,4
55,8
26,1
18
1856
36 039
26 190
72,6
53,8
27,7
18,5
1861
37 386
26597
71,152,2
29,4
18,5
1866
38 067
26 470
69,5
50,5
28,6
20,9
1872
36 103
24 870
68,8
50
28,4
21,6

Source : O. Marchand et C. Thélot, Deux siècles de travail en France, "Etudes", INSEE, 1995
Le maintien de gestes traditionnels
Jean-François Millet, Les Glaneuses, huile sur toile, 112x84, 1857, musée d'Orsay, Paris
Le peintre met au premier plan les glaneuses, incarnations de la pauvreté rurale. Celles-ci sont autorisées à passer rapidement, avant le coucher du soleil, dans les champs moissonnés pour ramasser un à un les épis négligés. Au second plan, on devine l'abondance de la moisson : meules, gerbes, charrettes et moissonneurs qui s'agitent
 
Les difficultés du monde rural
La vie d'une famille de paysans pauvres du Bourbonnais (Allier) au milieu du XIXème siècle.
Nous mangions du pain de seigle moulu brut, du pain couleur de suie et graveleux, comme s'il eut contenu une bonne dose de gros sable de rivière. C'était plus nourrissant, disait-on, de laisser l'écorce mêlée à la farine. La farine des quelques mesures de froment qu'on faisait moudre était réservée pour les beignets et pour les pâtisseries - tourtons et galettes - qu'on cuisait avec le pain (...). La soupe était notre pitance principale : soupe à l'oignon le matin et le soir, et, dans le jour, soupe aux pommes de terre, aux haricots ou à la citrouille avec gros comme rien de beurre. Le lard était réservé pour l'été et pour les jours de fête. Avec cela des beignets indigestes et pâteux d'où les dents s'arrachaient difficilement, des pommes de terre sous la cendre et des haricots cuits à l'eau, à peine blanchis d'un peu de lait. On se régalait les jours de cuisson à cause du tourton et de la galette; mais ces hors-d’œuvre étaient vite épuisés. Ah ! Les bonnes choses n'abondaient guère.
Emile Guillaumin, La vie d'un simple, 1904

La vie dans un canton rural du Puy-de-Dôme
Le canton de Saint-Amand-Roche-Savine se trouve placé dans les montagnes, le sol en est pauvre et peu favorisé de la nature. Doit-on attribuer à cette situation l'indifférence du cultivateur en fait d'améliorations agricoles ? Toujours est-il que l'agriculture n'a fait, pour ainsi dire, aucun progrès et que les domaine ou propriétés un peu considérables sont soumis aux mêmes modes de culture qu'il y a un siècle (…). La plupart des paysans émigrent comme scieurs de long, d'autres comme chiffonniers, et un grand nombre d'entre eux, trouvant un avantage marqué à changer de résidence, partent avec l'idée fixe de ne plus revenir et font dans d'autres lieux leur établissement. Ainsi la population tend-elle constamment à diminuer et la valeur des propriétés à décroître (…). Aucune amélioration agricole n'est à signaler dans le canton, points de prairies artificielles ! Point de récoltes sarclées ! Pas de variété dans la culture ! Partant point d’assolement ! Toujours la jachère ! Rien que la jachère ! Première année du seigle, deuxième année jachère ou culture improductive : quelques terrains de choix produisent de la pomme de terre.
« Un canton routinier dans le Puy-de-Dôme », enquête réalisée en 1855, cité dans M. Chaulanges, Textes historiques : le milieu du XIXème siècle, Delagrave
Les progrès agricoles dans la région de Toulouse
L'élevage des animaux a pris une extension considérable et les races se sont améliorées (…). Des croisements heureux avec les races anglaises ont profité à l'espèce ovine, sous le rapport de l'engraissement (…). L'augmentation du nombre des animaux a entraîné l'extension des cultures fourragères. La jachère perd tous les jours du terrain (…). La terre est mieux travaillée qu'autrefois ; ce résultat est principalement dû aux améliorations apportées dans la confection des instruments aratoires*. L'antique charrue de bois a presque partout disparu (…). Toutes nos exploitations ont des herses, un grand nombre possèdent des rouleaux à briser les mottes… Grâce à l'habileté de nos fabricants les coupes-racines, les hache-pailles, les égrainoirs à maïs sont d'un usage assez répandu. Le constructeur vient à peine d'aborder la batteuse* (…). Les communications intérieures ont reçu des développements immenses ; l'ouverture et l'entretien des routes et des chemins vicinaux ont transformé le Midi, mais le réseau de chemin de fer inachevé ne nous permet pas d'exploiter encore toutes nos richesses.
L. de Theron de Montaugé, rapport sur les travaux de la section de l'agriculture du congrès méridionale de 1859.
Aratoire : qui servent à travailler la terre
Batteuse : machine servant à séparer les grains de blé ou d'autres céréales de leurs épis qui remplace l'activité du battage à la main
Des améliorations agricoles dans la commune de Boncé, près de Chartres
Les machines n'ont pas enlevé beaucoup de travail. Quiconque veut travailler trouve toujours à se placer et très avantageusement. En un mot les machines sont venues prendre la place des ouvriers émigrants, elles sont devenues une nécessité et n'ont point enlevé de travail...
On n'emploie l'engrais artificiel qu'exceptionnellement et à défaut de l'engrais naturel. Une des causes du peu d'emploi de l'engrais artificiel est le manque d'argent, et aussi qu'il n'a pas souvent produit les résultats que le vendeur promettait.
L'assolement est triennal. La culture intensive est employée. On fait des betteraces. Il y a une distillerie. De là, plus d'engrais, amélioration du bétail en quantité et en qualité. On a renoncé au colza, par suite des insectes qui le dévoraient au moment de la récolte.
Extrait d'enquête agricole menée en 1866, cité dans Chaulanges, Manry, Sève, Textes historiques, 1848-1871, Delagrave, Paris, 1974
La ferme impériale : une ferme modèle

Expérience à la ferme impériale de Vincennes de la charrue à vapeur de Fowler, gravure de 1860
 
Les débuts de l'exode rural
Dans la première moitié du XIXème siècle, 90 000 migrants en moyenne quittent chaque année la campagne pour la ville. Ils sont plus de 130 000 par an dans les années 1860.
Il y a quelques années, nous avions très peu de tissages mécaniques et nous n'avions, pour ainsi dire, pas de filatures mécaniques ; aujourd'hui, la France a pris définitivement et glorieusement sa place parmi les pays de grande industrie (...). La vapeur dès son apparition dans le monde de l'industrie a brisé tous les rouets, toutes les quenouilles, et il a bien fallu que fileuses et tisseuses, privées de leur antique gagne-pain, s'en vinssent réclamer une place à l'ombre du haut-fourneau de l'usine (...).
Des villages entiers où naguère retentissaient le bruit du marteau, le ronflement des bobines, les cris joyeux de l'enfance, sont aujourd'hui déserts et silencieux tandis que de vastes édifices de briques rouges, surmontés d'une immense cheminée au panache ondoyant, engloutissent dans leurs flancs, depuis l'aube du jour jusqu'à la tombée de la nuit, des milliers de créatures vivantes. La vapeur fait tout dans le tissage (...) Chaque matin avant le lever du soleil, père, mère et enfants partent pour la fabrique.
Jules Simon, L'Ouvrière, 1861
Des campagnes désertées
Paysans d'Auvergne en route vers Paris, L'Illustration, 31 mai 1862