Les expériences de la démocratie

EMC – LA DEMOCRATIE, LES DEMOCRATIES

Axe 1 : Fondements et expériences de la démocratie

Au XXe siècle, la démocratie libérale est souvent remise en question. La démocratie chilienne d’Allende chute ainsi, en1973, à la suite du coup d’État du dictateur Pinochet. Mais des processus inverses se produisent aussi dans la seconde moitié du XXe siècle. Les transitions démocratiques imposent une libéralisation, plus ou moins progressive, des régime autoritaires (les dictatures en Espagne et Portugal dans les années1970), totalitaires (la fin de l’URSS à la fin des années1980) ou racistes (le régime de l’apartheid en Afrique du Sud dans les années 1990).
Objectif de la séance : Comprendre le caractère instable des régimes démocratiques à travers le monde à travers des exemples de renversement ou de restauration de la démocratie

Les objectifs du syndicat Solidarnosc

Qui sommes-nous et vers quoi tendons-nous ?

Le syndicat indépendant et autogéré Solidarnosc s'est formé à partir du mouvement de grève de 1980 (…). Ce mouvement a connu son point culminant en août 1980 sur le littoral de la Baltique. En une année, il a gagné tous les milieux du monde du travail : ouvriers et paysans, intellectuels et artisans.

À l'origine de notre syndicat, il y a tout simplement les besoins des gens simples de notre pays, leurs souffrances et déceptions, leurs espoirs et désirs. Notre syndicat s'est développé à partir d'une révolte de la population polonaise, éprouvée pendant plus de 30 ans par les violations des droits de l'homme et du citoyen (…).

Les conditions de vie ne nous importent pas seules, quoi que l'on ait mal vécu et que l'on ait travaillé dur et souvent sans résultat. L’Histoire nous a appris qu'il n'y a pas de pain sans liberté. Il s'agit également, pour nous, de la justice, de la démocratie, de la vérité, de la légalité, de la dignité humaine, de la liberté de penser, du renouveau de la Pologne, et non seulement du pain, du beurre et du saucisson (…). La protestation économique doit en même temps être une protestation sociale, et celle-ci doit en même temps être de nature morale.

(…) C'est l'aboutissement logique de l'action indépendante d'ouvrier, d’intellectuels et de jeunes, des efforts de l'Eglise pour la sauvegarde des valeurs, c'est l'héritage de toutes les luttes pour la dignité humaine menées dans notre pays. Notre syndicat a pris naissance dans ces luttes et leur restera fidèle.

Programme de Solidarnosc, thèses élaborées par le Congrès des délégués à Gdansk, le 7 octobre 1981, Presses universitaires de Lille, 1982

Le rôle de Solidarnosc en Pologne

Pour l'instant, nous en sommes à combattre ce que les communistes appellent les « séquelles du stalinisme » (…). Il faut en finir avec un tel exercice du pouvoir. Aujourd’hui, les problèmes de tous les pays de l'Est sont pratiquement identiques. Crise économique, crise de confiance, recherche d'un nouveau consensus. Chaque pays a son propre remède. En Pologne, c'est Solidarnosc mais aussi l'église catholique, qui n'a jamais été aussi puissante, et l'agriculture privée, actuellement protégée par le pouvoir car elle seule produit encore en dépit de la crise. En URSS, le remède est la Perestroïka, et la situation est très différente car l'initiative des réformes a été prise par le parti (…)

Entretien avec Lech Walesa pour Libération, en décembre 1988

Le pape Jean-Paul II et Lech Walesa le 11 juin 1987 à Gdansk.
Crédit photo : Arturo Mari/AFP
 

Du nouveau à l'est

L'appartenance des Etats européens à des systèmes sociaux différents est une réalité. Et la reconnaissance de ce fait historique, le respect du droit souverain de chaque peuple de choisir librement un régime social constitue les prémices d'un processus européen normal.

L’organisation sociale et politique des différents pays a subi par le passé des modifications et ce processus peut continuer. Toutefois, c'est au peuple d'en décider et de faire leur choix. Toute ingérence dans les affaires intérieures, toute tentative de limiter la souveraineté des Etats - qu'il s'agisse des amis et alliés ou de n'importe quel autre État - sont inadmissibles

Mikhail Gorbatchev, Discours devant le Conseil de l'Europe, Strasbourg, 7 juillet 1989

Le retour au pluralisme démocratique en Pologne

La nécessité d'aider la nation à sortir de l'importante crise politique et économique qu'elle traverse et la transformation démocratique des conditions du pouvoir autorisent le dialogue entre tous les cercles politiques qui se sentent responsables pour le futur. Résoudre la crise et créer un système multipartite n'est possible qu'avec l'assentiment des forces démocratiques (…). Il est dans notre intérêt mutuel que les conflits sociaux soient résolus en accord avec les règles généralement admises dans la culture politique européenne : avec le consentement du public. La transition d'un système de parti unique à une démocratie représentative et un gouvernement constitutionnel ne peut se réaliser qu’à l'issue d'élections libres (…). La transition politique pacifique et l'amélioration de la forte tension économique et sociale ne peuvent se réaliser que par un accord mutuel. Toutes les organisations civiles et les mouvements doivent participer côte-à-côte au procès compliqué et contradictoire de transition (…). Selon le secrétaire Czyrek, le général Kiszczak serait prêt à entamer la table ronde (1) le mercredi (14 juin 1989) ou mercredi prochain.

Lettre fixant les cadres de la négociation, dans Cold War international History Project Bulletin

(1) Le 10 juin 1989, un accord est passé entre le parti ouvrier unifié polonais et les membres de l'opposition, pour organiser une table ronde.

Si l'on compare les mécanismes du changement dans les pays du communisme réel, on peut dire, me semble-t-il, que le détonateur du changement en Pologne fut le grand compromis de la « Table ronde ». C’est à dire une situation qui vit l’aile réformatrice du parti au pouvoir prendre la décision de laisser l'opposition occuper une place légale sur la scène publique. Cette décision cachait autre chose. On pouvait y lire en filigrane l'accord des réformateurs pour une transformation radicale de la scène politique. Il ne s'agissait pas simplement de légaliser l'opposition. Il s'agissait de renoncer au principe fondamental du régime communiste (…).

Si l'on examine notre histoire récente avec un certain recul, on est frappé par plusieurs facteurs qui jouèrent un rôle prépondérant.

Le premier facteur fut la tradition historique. Aux yeux des étrangers, ce qui faisait la particularité de la Pologne, c'est qu'elle vivait, plus que les autres pays, l'histoire au quotidien (…). Dans la vie quotidienne polonaise, les débats sur l’histoire jouaient un rôle plus important que partout ailleurs. Qui, à tel ou tel moment de notre histoire, avait eu raison ? (…).

Le second facteur fut l'Eglise catholique (…), l'Eglise était l'unique institution pleinement indépendante de l'Etat totalitaire. L'Eglise, en Pologne, était un Etat dans l'Etat. Elle avait sa légende et le mérite inouïe d'avoir sauvegarder l'identité nationale polonaise.

Adam Michnik, La Deuxième Révolution, La Découverte, 1990

 
19/20 FR3 du 27 mai 1990 : Elections municipales libres en Pologne | Archive INA

Reportage à regarder à partir de 5'55 jusqu'à 7'27
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