DuckDuckGo, Ecosia, Lilo, Qwant et Seznam demandent à pouvoir être présents sur l’écran d’accueil des smartphones fonctionnant sous Android, le système d’exploitation de la firme californienne.
Après l’offensive de l’administration américaine menée le 20 octobre contre Google, la démarche lancée par cinq moteurs de recherche alternatifs (DuckDuckGo, Ecosia, Lilo, Qwant, Seznam) contre le mastodonte américain s’apparente à un coup de griffe. Elle démontre en tout cas une hostilité grandissante à l’égard du géant californien.
Dans une lettre adressée mardi 27 octobre à la vice-présidente de la Commission européenne, Margrethe Vestager, ces acteurs lui enjoignent de convoquer une réunion avec les représentants de la firme de Mountain View. Leur demande : avoir la possibilité d’être présents sur l’écran d’accueil des smartphones fonctionnant sous Android, le système d’exploitation de Google, soit entre 70 % et 80 % des téléphones en France.
En 2018, Google a été condamné par la Commission européenne à une amende de 4,3 milliards d’euros pour abus de position dominante, portant notamment sur sa présence hégémonique dans le domaine de la recherche sur Internet. En réaction, la société a accepté, en 2019, d’ouvrir sur le Vieux Continent la porte à d’autres moteurs de recherche sur les appareils fonctionnant sous Android, mais seulement dans le cadre d’enchères qui permettent chaque trimestre à trois de ses concurrents d’offrir leurs services aux consommateurs.
C’est ce principe que contestent des acteurs français comme Qwant (qui s’est prêté au jeu des enchères) ou Lilo (qui ne l’a pas fait). Pour Sophie Bodin, directrice de Lilo, la solution offerte par Google n’est absolument pas satisfaisante. « Elle favorise ceux qui ont de l’argent », déplore-t-elle, alors que son entreprise reverse déjà 50 % de son chiffre d’affaires à des associations ou des projets.
Qwant ne s’y retrouve pas davantage. Pour Jean-Claude Ghinozzi, son patron, le système mis en place par Google revient à « payer des amendes » à la société californienne. Il voudrait que tous les moteurs de recherche soient proposés par défaut sur chaque nouvel appareil Android, et ce sans contrepartie financière. Très critique à l’égard de Google, le dirigeant se réjouit, à l’inverse, de l’accord conclu avec le fabricant chinois de smartphones Huawei, qui propose désormais d’installer Qwant comme moteur de recherche par défaut.
Vincent Fagot, article paru dans le Monde, octobre 2020
Plusieurs moteurs de recherche alternatifs européens dénoncent, auprès de la Commission européenne,
Ils s’appellent Qwant, DuckDuckGo, Lilo, Ecosia ou Seznam. Ils viennent d’écrire à la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, pour protester contre le système d’enchères auquel les soumet Google pour avoir le droit d’apparaître sur les smartphones Android.
Ces moteurs de recherche européens, concurrents du tout-puissant Google, vous les utilisez peut-être sur votre smartphone. Mais si vous possédez un appareil Android, vous avez remarqué que c’est vous qui devez choisir celui qui vous intéresse lors de l’initialisation de l’appareil. C’est ce que l’on appelle le "Choice Screen". C’est la conséquence de la condamnation en 2018 du géant américain par la Commission européenne, pour abus de position de dominante.
Ce que vous ne voyez pas, c’est que, pour avoir le privilège de figurer dans ce "Choice screen", les moteurs en question sont mis régulièrement en concurrence. Tous les trois mois, ils doivent participer à des enchères et seuls ceux qui payent le plus cher ont le privilège de faire partie de la sélection.
Aujourd’hui, les intéressés ne veulent plus de ce système. Ils dénoncent une mécanique injuste et ruineuse qui, au passage, remplit les poches de Google. Ils ont donc décidé d’alerte la Commission européenne. Il ne s’agit pas, pour l’instant, d’une action judiciaire en bonne et due forme. Peut-être un jour ?
Des milliards de dollars versés par Google à Apple
Pendant ce temps-là, aux États-Unis, une affaire un peu similaire met sous pression les deux géants Google et Apple. Cela concerne, cette fois, l’iPhone. Le ministère de la justice américain vient de déposer une plainte, qualifiée d’historique par le New York Times, contre les deux monstres de la Silicon Valley. Motif : depuis plusieurs années, Google paye à Apple des sommes annuelles astronomiques, allant de 8 à 12 milliards de dollars, afin d’avoir le droit d’être le moteur de recherche exclusif par défaut sur les iPhone.
Chaque fois que vous faites une recherche sur Internet sur un iPhone avec le navigateur Safari (qui appartient à Apple), vous utilisez sans le savoir le moteur de recherche Google Search (qui appartient à Alphabet/Google). Là encore, ce n’est pas très bon pour la concurrence.
On verra ce que la justice décidera. En attendant, Apple pourrait essayer de développer son propre moteur de recherche, afin de se passer de Google. Mais quand on voit que c'est ce qu’ils essayent de faire depuis des années, sans grand succès, avec la cartographie GPS, on se dit que ce n’est pas gagné…
Article de Jérôme Colombain (Radio France), France.info, 28 octobre 2020