Un marché plutôt gagnant-gagnant
L'engagement croissant de la Chine en Éthiopie est tout sauf une affaire de charité. Il s'agit plutôt d'un marché gagnant-gagnant. L'Ethiopie y gagne une diversification inespérée de son économie et une importante réduction d'un chômage qui touche environ 25 % de la population active. La Chine, elle, obtient des coûts de production avantageux pour son industrie.
À Addis Abeba, le salaire moyen dans l'industrie manufacturière tourne autour de 60$ par mois contre plus de 600$ en Chine. Conséquence : les entreprises chinoises cherchent plus que jamais à transférer leurs activités les plus intensives en main d'œuvre peu qualifiée dans de nouveaux eldorados salariaux pour rester compétitives par rapport à des concurrents prêts à déplacer des sites industriels comme des briques de Lego.
En Afrique, de plus en plus de pays pouvant offrir des coûts logistiques plus avantageux que ceux de l’Ethiopie (pays enclavé) grâce à leurs infrastructures portuaires modernes, font des appels du pied à la Chine, qui devrait délocaliser 85 millions d'emplois industriels dans les prochaines années.
Walid Kefi, « L'Ethiopie à l'avant-poste de des délocalisations chinoises en Afrique :
85 millions d'emplois à gagner ! », Ecofin Hebdo, 4 mai 2018
Des investissements qui transforment les villes
Avec ses lanternes rouges suspendues à l'entrée, cet ensemble de 13 tours au milieu des palmiers pourrait aussi bien se trouver à Shenzhen, à Chongqing ou dans la banlieue de Shanghai. Le processus de « sinisation » touche une bonne partie de la ville. Les voitures circulent sur des routes chinoises parfaitement lisses, des grues chinoises bâtissent des immeubles de plus en plus hauts, des machines à coudre ronronnent dans des usines chinoises au sein de zones industrielles chinoises, les touristes arrivent dans un aéroport agrandi par les Chinois et des passagers se rendent au travail dans des trains chinois ultra-modernes. En un mot, Addis Abeba est en train de devenir une ville construite par les Chinois (…)
Le gouvernement éthiopien, qui voyait la Chine comme un modèle de développement, lui a confié la construction de son infrastructure (…). En 20 ans, les Chinois ont réalisé une série de projets, dont un périphérique (75 millions d’euros), l'échangeur de Gotera (11 millions), la 1ère autoroute à 6 voies du pays (700 millions) une ligne ferroviaire Addis Abeba-Djibouti (3,5 milliards) qui relie ce pays enclavé à la mer (…). Les Chinois ont également construit à Addis Abeba le 1er métro de l'Afrique subsaharienne (…). En 2020, lorsqu'elle sera achevée, la tour en verre de 46 étages que la China State Construction Engineering Corporation est en train de construire sera la plus élevée d'Ethiopie. La tour la plus symbolique de la ville est bien entendue le très futuriste siège de l'Union africaine, offert à Addis Abeba par Pékin en 2012
« Éthiopie. Addis Abeba, la ville que construisent les Chinois », Courrier international, 7 décembre 2018