Le sommet Chine-Afrique, “une occasion pour repenser l’avenir du partenariat”
Ce 4 septembre s’ouvre à Pékin la neuvième édition du Forum sur la coopération sino-africaine (Focac). L’Afrique se révèle incontournable dans l’ambitieuse initiative chinoise “la Ceinture et la Route”. La presse africaine note l’empressement des pays africains à y participer et appelle à un rééquilibrage des relations avec le géant mondial.
Pour son neuvième sommet, le Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) se tient à Pékin du 4 au 6 septembre 2024. Un rendez-vous diplomatique au sommet entre la Chine et les États africains, créé en 2000, et qui, tous les trois ans, illustre le dynamisme diplomatique et économique croissant entre la Chine et le continent.
“Se donner la main pour faire avancer la modernisation et construire une communauté sino-africaine de haut niveau avec un avenir commun” : cette année, le thème du sommet, un peu filandreux, semble indiquer la volonté de renforcer les relations sino-africaines et d’explorer de nouvelles voies de collaboration, veut croire la presse africaine.
Mais derrière cette thématique flottante, le Focac est un instrument d’une redoutable efficacité. ISS Africa rappelle ainsi que ses mécanismes institutionnels auraient permis “la réalisation de projets à hauteur de 155 milliards de dollars [140,35 milliards d’euros] en octobre 2021, sur un total de 191 milliards de prêts accordés entre 2006 et 2021”.
Historiquement, le Focac a donné lieu à des engagements financiers notables : le sommet de 2021 a débouché sur une promesse de 40 milliards de dollars [36,22 milliards d’euros] couvrant les infrastructures, l’agriculture et l’industrie manufacturière, souligne de son côté le Daily Maverick.
Un raout diplomatico-économique
La presse africaine s’attarde également sur l’empressement avec lequel de nombreux chefs d’État ont fait le déplacement.
Le Nigeria avec le président Bola Tinubu, le Rwanda avec le président Paul Kagame, le Congo avec le président Denis Sassou-Nguesso, la République démocratique du Congo avec le président Félix Tshisekedi, le Tchad avec Mahamat Idriss Déby, le Sénégal avec le président Bassirou Diomaye Faye, la Guinée avec Mamadi Doumbouya… Autant de pays dont les chefs d’État seront présents, en plus de délégations ministérielles et de chefs d’entreprise.
Côté Kenya, le président William Ruto participera au Forum, et Capital News note que le pays d’Afrique de l’est a été “un partenaire crucial” de l’initiative chinoise “Une ceinture, une route”, dite “les nouvelles routes de la soie”, vaste projet qui a conduit à de nombreux projets chinois d’infrastructures dans le pays africain. De diverses lignes de chemin de fer à l’autoroute de Nairobi en passant par le terminal pétrolier de Kipevu, “tous ces projets ont joué un rôle déterminant dans l’avancement des infrastructures et du développement économique du Kenya”, commente le site kényan. En outre, la Chine reste l’un des principaux partenaires commerciaux du Kenya, avec des volumes d’échanges bilatéraux dépassant les 8 milliards de dollars (7 milliards d’euros) entre 2022 et 2023 (...) “Une coopération mutuellement bénéfique”
Toute l’Afrique ou presque a donc pour la Chine les yeux de Chimène. Mais la presse africaine tempère cet enthousiasme. À commencer par ISS Africa qui appelle à “saisir cette occasion pour repenser l’avenir du partenariat”. Selon le site panafricain d’analyses internationales, si les pays africains abordent le Focac de “manière stratégique”, ce sommet pourrait ouvrir “une nouvelle ère de coopération durable et mutuellement bénéfique”.
Une façon d’appeler à mieux équilibrer les relations entre la Chine et l’Afrique de façon qu’elles profitent à tous les partenaires, et que les accords bilatéraux soient “clairement alignés sur les objectifs de développement du continent”. Et non plus sur les seuls intérêts chinois.
En effet, certains projets financés par la Chine en Afrique ont accru le poids de la dette sur les économies africaines et augmenté indirectement les inégalités en Afrique, tout “en ne répondant pas suffisamment aux besoins socio-économiques locaux”, assure ISS Africa. La Deutsche Welle rappelle de son côté que les prêts accordés par la Chine aux pays africains ont atteint en 2023 leur niveau le plus élevé depuis cinq ans.
“Les investissements du Focac, souvent orientés vers les intérêts géopolitiques et stratégiques chinois, peuvent ne pas correspondre aux besoins et priorités de développement des pays bénéficiaires.”
ISS Africa relève, en outre, que ce sommet se déroulera dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes, avec une exacerbation de la rivalité sino-américaine, dont l’un des théâtres semble devoir être l’Afrique.
Dans cette optique, la Chine essaie de renforcer ses liens avec les pays dits du Sud global, “considérant ces relations non seulement comme des opportunités économiques, mais aussi comme des éléments cruciaux d’une force politique mondiale émergente”, commente la revue internationale.
Courrier international, article publié le 4 septembre 2024