Un tribunal au bilan contesté
Pour Damien Vandermeersch, professeur de droit pénal international à Louvain, le bilan du TPIR est mitigé. Ce magistrat belge a mené l'instruction dans 4 affaires de présumés génocidaires jugées en Belgique. Il regrette notamment que certains crimes attribués au FPR, ke groupe rebelle de Paul Kagame qui a stoppé le génocide et est resté depuis au pouvoir, n'aient pas été jugés. "Il y a des points positifs dans le sens où il y a quand même de gros poissons qui ont été jugés, estime-t-il. Mais une des critiques, c'est que le TPIR s'est attaqué uniquement au camp des vaincus. Il existe quand même des éléments qui donnent à penser que des crimes ont été commis par l'autre partie, c'est à dire le FPR. Il faut reconnaitre que de ce côté-là, le TPIR n'a pas rempli sa mission".
Pour Jean-François Dupaquier, journaliste, écrivain, ancier expert-témoin auprès du TPIR, un des échecs du tribunal est de ne pas avoir ouvert le dossier de la famille Habyarimana. "Pour des raisons qu'on n'arrive pas à comprendre, le tribunal s'est refusé à examiner le cas de la famille du président Habyarimana, et notamment de son épouse Agathe Habyarimana, dont on sait qu'elle a joué un rôle important dans le génocide, souligne-t-il. Et cette timidité du tribunal a eu de lourdes conséquences puisque jusqu'à aujourd'hui (...) nous n'avons toujours pas eu une preuve judiciaire de l'organisation du génocide dans les mois et les années qui ont précédé le 6 avril 1994."
Le TPIR met la clef sous la porte, mais ce n'est pas pour autant la fin des poursuites contre de présumés génocidaires. Il y a donc le cas des 8 inculpés pour génocide par le tribunal toujours dans la nature. 8 gros bonnets toujours en fuite.
Le dernier inculpé, arrêté en RDC, est Ladaslas Ntaganswa, l'ancien maire de Nyakizu. C'est le procureur du mécanisme pour les tribunaux internationaux des Nations unies qui a annoncé cette arrestation. Ce mécanisme créé en 2010 est une structure chargée d'achever les travaux du TPIR et de son homologue pour l'ex-Yougoslavie, le TPIY. Son siège est à Arusha, en Tanzanie. Ce mécanisme prend donc le relai du tribunal sur les dossiers en cours, mais n'en ouvre pas d'autres.
RFI Afrique, 31 décembre 2015