Doc 3 : Les territoires ultramarins et le rayonnement maritime de la France
Forte de 11 millions de km2 de ZEE et d'espaces maritimes (97 % outre-mer), la France, grâce à sa surface littorale et ses départements et collectivités d'outre-mer, est la 2ème puissance maritime du monde derrière les États-Unis et devant l'Australie (…).
La mer présente des atouts considérables et les outre-mer sont au cœur du défi de la maritimisation du monde. Les enjeux stratégiques pour notre pays sont de 3 ordres : sécuritaires, économiques et environnementaux (…).
Les grandes routes du trafic maritime mondial sont extrêmement importantes et passent non loin de nos territoires d’outre-mer plus de 9,6 milliards de tonnes en 2014, soit plus de 80% du trafic mondial de marchandises. A l'horizon 2020, ce sont plus de 14 milliards de tonnes qui sont attendues.
En 2012, la France a engagé la réforme des ports ultramarins dans 4 DOM (Guadeloupe, Martinique, Guyane et la Réunion). La situation de la Réunion dans l'océan Indien est importante, avec le basculement vers l'Asie de l'économie mondiale. Le choix de la CMA-CGM (1) d'en faire son hub régional est très significatif.
La réforme portuaire outre-mer vise à améliorer la compétitivité, créer des emplois, adapter le secteur aux mutations. La stratégie nationale portuaire outre-mer, présentée lors du dernier CIMER (2) en octobre 2016, évoque la nécessité pour les ports ultramarins de s'adapter aux mutations du transport maritime par le développement des infrastructures et les services portuaires.
« La dimension maritime et stratégique des Outre-mer », site du ministère des Outre-mer, 17 novembre 2016
(1) Entreprise française de transport maritime
(2) Comité interministériel de la mer
Si la Nouvelle Calédonie a d'abord occupé les fonctions de lieu de déportation pour la France, les enjeux économiques et géostratégiques ont rapidement pris le pas sur l'intérêt carcéral et sur l’attrait scientifique et culturel. L'importance acquise par la région est visible avec la création en 1963 du Centre d'expérimentation du Pacifique, où il a été procédé à 210 essais nucléaires entre 1963 et 1996.
Surfaces restreintes, faibles populations, mais intérêts stratégiques majeurs, notamment en ce qui concerne les zones économiques exclusives de ces archipels, 6 ,8 millions de km2 pour le seul Pacifique. Car le partage des mers est aujourd'hui un enjeu économique mondial. Plus de la moitié de la pêche mondiale de poissons sauvages provient de l'océan Pacifique, qui constitue le plus gros réservoir de thonidés au monde. Par ailleurs, une étude de l'Ifremer de 2011 rapportait la richesse de la ZEE polynésienne en cobalt et en platine. L'exploitation de cette zone, cependant, n'est pas prévue avant 2030.
La présence de la France en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie lui assure une position stratégique dans cette zone et, à ce titre, elle est la seule nation européenne partenaire du dialogue Forum des îles du Pacifique, réunion de 16 pays indépendants et associés de l'Océanie dans les domaines de l'environnement, des télécommunications, de l'aviation civile, de l'énergie, de la sécurité, du commerce, de la pêche et des communications maritimes. Ces territoires, cependant, sont aujourd'hui l'objet de convoitises des grandes puissances limitrophes, à commencer par la Chine, et des investisseurs étrangers. Cette attirance des investisseurs étrangers pose, à terme, la question de l'évolution de leur statut dès lors que la France ne serait plus un partenaire privilégié. Car il ne faut pas oublier que tant la Nouvelle-Calédonie que la Polynésie française figurent sur la liste des « territoires non autonomes ». Quel avenir pour ces territoires océaniens ? Dans une période où, au développement économique de ces petites économies insulaires s'ajoute l'enjeu du dérèglement climatique, la réponse réside probablement dans la redéfinition des liens, tant avec la France qu'avec l'environnement régional.
Patrick Roger (journaliste), Géopolitique des îles en 40 cartes, hors-série Le Monde, août 2019
D'après Olivier Milhaud, La France des marges, La documentation française, mars-avril 2017.