Exposition 6 :
L'Union européenne : entre élargissements, approfondissements et remises en cause
THEME 3 :
LA GOUVERNANCE MONDIALE DANS UN MONDE MULTIPOLAIRE
Un pays divisé face au Brexit
 

Les causes structurelles du Brexit

Au Royaume‑Uni, l'euroscepticisme est à la fois le fruit d'évolutions récentes et de traditions politiques plus anciennes, remontant au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Dès l'amorce du processus de construction européenne, le pays avait tenu à garder ses distances. Pour l'expliquer, il convient de dépasser le stéréotype de l'insularité. Certes, cette méfiance est en partie porteuse d'arguments souverainistes, par ailleurs toujours présents dans le discours eurosceptique d'aujourd'hui. Contrairement à ses voisins d'Europe continentale, le Royaume‑Uni n'a pas subi l'occupation nazie, ni n'a fait le jeu de la collaboration. Il n'a donc pas ressenti le besoin de se reconstruire via un partenariat inter‑étatique poussé. Au contraire, lors de la période dite du « consensus » (1945‑1979), conservateurs et travaillistes ont partiellement mis leurs différences politiques de côté pour rebâtir le pays [...]. La confiance dans le Parlement de Westminster (à Londres) comme rempart contre les ingérences politiques, qu'elles viennent du monarque tenté par la tyrannie ou par des puissances extérieures, est au cœur des principes constitutionnels britanniques depuis le XVIIIe siècle, et demeure depuis lors l'un des piliers de l'identité nationale.
Ophélie Siméon « Brexit et euroscepticisme », La Vie des idées, 23 juin 2016.
Une caricature du Brexit
Crédits : Chappatte dans The International New York Times

Patrick Chappatte, « Une Angleterre sans l'Europe », The International New York Times, 23 juin 2016.
« Enfin libres » ; « Qui allons‑nous blâmer pour nos problèmes maintenant ? »
 
Les revendications des partisans du Brexit
Matt Dunham/AP/Sipa

« Qui dirige réellement ce pays ? 75 % de nos lois sont maintenant faites à Bruxelles ». Affiches du parti pro-Brexit Ukip lors de la campagne pour le référendum de 2016.
 
Vers le Brexit
Dessin de Chappatte paru dans le New York Times, 8 mai 2015

Au Royaume-Uni, le Parti conservateur, conduit par David Cameron, remporte les élections de mai 2015, après avoir promis un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, du fait de l’euroscepticisme des Britanniques. Le caricaturiste anticipe dès cette date le résultat du vote
 
Le référendum britannique du 23 juin 2016
 

Les positions des opposants au Brexit

L'incidence sur l'activité économique proviendra de l'incertitude des investisseurs et de la potentielle diminution des échanges. […]

L'UE voudra toujours nous vendre des biens. Ce sera le cas. Mais le Royaume-Uni est un marché moins important pour l'UE que celle-ci l'est pour nous. […] L'UE ne voudra pas offrir à la Grande-Bretagne un accord spécial, de peur d'encourager les partisans d'une sortie de l'UE d'autres pays.

Enfin, nous arrivons à l'immigration, […] en tout état de cause, l'année dernière, un peu plus de personnes sont venues au Royaume-Uni en provenance de pays non-membres de l'Union européenne que de pays membres. L'élimination de toute la migration de l'UE ne réduira pas le total à des « dizaines de milliers ».

La campagne n'a pas non plus abordé le problème selon lequel le « contrôle de nos frontières » est incompatible avec les arrangements actuels en Irlande, où il n'y a pas de contrôle. Soit nous devrons imposer des contrôles aux frontières soit nous devrons laisser les contrôles de nos frontières aux Irlandais. Les Irlandais ont la libre circulation au sein de l'UE ; ainsi, tout citoyen de l'UE peut actuellement franchir la frontière.

Buttonwood, “The arguments for voting Remain”, The Economist, 14 juin 2016.

Une justification du Brexit

Il y a un peu plus de six mois, les Britanniques ont voté [...] pour quitter l'Union européenne [...].
Le 23 juin n'est pas le résultat d'une volonté de repli sur soi du Royaume‑Uni. C'est au contraire le moment où nous avons fait le choix de construire un véritable Global Britain. [...] Beaucoup craignent que cette décision annonce le début d'un délitement plus important de l'Union européenne. Mais soyons clairs : je ne souhaite pas que cela arrive. Ce ne serait en rien dans l'intérêt du Royaume‑Uni. C'est incontestablement dans l'intérêt du Royaume‑Uni que l'Union européenne soit un succès. [...]
Je m'adresse donc à nos amis européens. Notre décision de quitter l'Union européenne ne traduit pas un rejet des valeurs que nous partageons. La décision de quitter l'UE ne traduit pas non plus une volonté de s'éloigner de vous, nos amis et voisins. [...] Nous ne voulons pas remonter le temps et revenir à l'époque d'une Europe moins en paix, moins sûre, et moins en capacité de faire du commerce librement. Ce fut un vote pour restaurer, comme nous le souhaitons, notre démocratie parlementaire, notre capacité à décider au niveau national [...].
Vous serez toujours les bienvenus dans ce pays, tout comme j'espère que nos citoyens seront les bienvenus chez vous. Nous quittons l'Union européenne mais nous ne quittons pas l'Europe.
Discours de la Première ministre Theresa May, 17 janvier 2017.

Les indépendantistes écossais et le Brexit

Le plan actuel du Brexit du gouvernement britannique retirera l'Écosse de l'Union européenne, le partenariat international le plus réussi et le plus développé au monde, en contradiction directe avec la volonté démocratique de l'Écosse.

Les députés du SNP(1) ont voté contre l'accord du Premier ministre [Boris Johnson]. L'Écosse a voté à 62 % pour rester dans l'Union européenne en 2016, ce qui a toujours été ignoré par le gouvernement britannique.

L'accord nous appauvrira, diminuera nos droits et nuira aux générations futures.

Les dernières recherches présentent une image saisissante du choc économique que ce mauvais accord aura sur l'Écosse – nous avertissons que chaque Écossais perdra 2 300 £ [environ 2 700 €] par an, que cela supprimera 80 000 emplois et nuira à la croissance et aux opportunités commerciales pendant des décennies.

Les législatures décentralisées d'Écosse, du Pays de Galles et d'Irlande du Nord ont toutes refusé de donner leur accord au projet de loi du gouvernement britannique qui permettra au Royaume-Uni de quitter l'UE.

Le Brexit est encore loin, nous commençons seulement à engager les négociations difficiles et prolongées qui seront nécessaires pour définir les relations futures du Royaume-Uni avec l'UE. Nous continuerons de faire pression sur le gouvernement pour exclure un accord catastrophique.

Source : « Quel est le plan du SNP pour le Brexit ? », site Internet officiel du SNP (février 2020).

Janvier 2020 : la sortie de l'UE

Aujourd'hui est un jour très triste pour l'Europe. À la fin de cette semaine, après 47 ans, le Royaume‑Uni mettra fin à ses relations historiques avec l'Union européenne. Nous sommes bouleversés de voir le Royaume‑Uni partir. Nous respectons la décision du peuple britannique, mais sa décision souveraine ne nous empêche pas de dénoncer les dirigeants politiques qui ont influencé l'opinion publique britannique à travers une campagne populiste et mal informée. [...] L'Union européenne est bien plus qu'un marché et nous devons avancer. Nous construisons un espace de droits, de sécurité et de progrès social à travers lequel de nombreux Britanniques – en particulier les travaillistes – se sont battus pendant des décennies [...]. L'histoire du Royaume‑Uni et celle de l'Union européenne ne font qu'une. Nous partageons également nos lois et nos valeurs. Si le peuple britannique décide de revenir, nos bras seront ouverts.
Iratxe García Pérez, eurodéputée, intervention au Parlement européen, mercredi 29 janvier 2020.
La sortie du Royaume-Uni de l’UE
« Pour certains, la sortie du Royaume-Uni est une catastrophe : de fait, l’Union européenne perd l’une de ses trois grandes puissances, une des plus importantes places financières au monde, le premier partenaire diplomatique des États-Unis en Europe. Pour d’autres, elle peut permettre de ressouder l’Union: le Royaume-Uni étant historiquement l’un des pays les moins favorables à l’intégration européenne, sa sortie peut inciter les autres États à aller de l’avant […].
Le Royaume-Uni devrait avoir à verser une cinquantaine de milliards d’euros au budget européen, un montant qui correspond à ses engagements jusqu’à la fin du cycle budgétaire […]. Les négociations portent également sur la libre circulation des personnes entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, ce dernier souhaitant limiter l’immigration sur son territoire […]. L’Irlande, qui partage sa seule frontière terrestre avec le Royaume-Uni, se retrouverait isolée en cas de rétablissement des postes douaniers entre les deux pays […].
Une grande partie des pourparlers concerne, par ailleurs, les futures relations commerciales entre l’UE et le Royaume-Uni alors que près de la moitié des exportations britanniques est destinée à l’Union européenne.
L’Angleterre a également vu ses relations avec le gouvernement écossais se détériorer. Ce dernier envisage un nouveau vote sur l’indépendance de la province.»
« Qu’est-ce que le Brexit ? », www.touteleurope.eu, 2020.
Royaume-Uni : les premiers effets du Brexit - Le dessous des cartes | ARTE
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