Rayonnement et attractivité de la France
THEME 2
DYNAMIQUES TERRITORIALES, COOPERATIONS ET TENSIONS DANS LA MONDIALISATION

Chapitre 3 :

La France : un rayonnement international différencié et une inégale attractivité

Objectif :

· Caractériser et analyser le degré de rayonnement et d’attractivité de la France à l’échelle mondiale


Déroulement :

· 2 heures de travail en autonomie en classe
· Finalisation en autonomie à la maison (si besoin)
· Restitution à l’oral devant la classe ou sous la forme d’une carte mentale
 
L'influence française dans le monde
 
La 10 premières puissances militaires dans le monde en 2018
 
Des soldats français à Gao, Mali
La France mène de nombreuses opérations militaires dans le monde. Déployée au Sahel depuis 2014, l’opération Barkhane engage près de 4 000 militaires français dans la lutte contre les groupes terroristes établis dans cette région.
 
Où l'armée française est-elle engagée dans le monde ?
Original link
Les puissances militaires - Léléphant - La revue de culture générale
« Imagine qu’il n’y ait aucun pays / Ce n’est pas dur à faire / Aucune cause pour laquelle tuer ou mourir / Aucune religion non plus / Imagine tous les gens / Vivant leur vie en paix… » Pour se prêter au travail d’imagination que nous propose John Lennon, il convient d’ignorer le terrible bilan de …
Original link
Les axes du projet de loi de programmation militaire (2019-2025)
« – Permettre aux armées de remplir leurs missions de manière soutenable et durable ;
– renouveler les capacités opérationnelles permettant de répondre aux besoins opérationnels immédiats et de faire face aux engagements futurs ;
– garantir notre autonomie stratégique et contribuer à la consolidation d'une défense en Europe en rééquilibrant des fonctions stratégiques (dissuasion, connaissance et anticipation, prévention, protection, intervention) et construire ainsi un modèle d'armée complet, capable de jouer un rôle moteur voire fédérateur pour la consolidation de l'Europe de la défense ;
– innover pour faire face aux défis futurs, en préparant la supériorité opérationnelle des armées à plus long terme ; cette innovation permettra ainsi de disposer des équipements adaptés aux menaces futures. »
Extrait du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 présenté par la ministre des Armées, Florence Parly, 8 février 2018.

Le rayonnement militaire français à Djibouti

Les forces françaises de Djibouti sont la plus grande force française permanente stationnées en Afrique. Ce réservoir permet de projeter rapidement des forces en cas de crise, comme ce fut le cas avec les opérations Barkhane ou Chammal (1). Cette présence vise à répondre en outre à 2 objectifs stratégiques majeurs : la capacité à intervenir sur les lignes de communication maritimes et la lutte contre le terrorisme. L'importance stratégique et la stabilité de Djibouti n'ont pas échappé aux autres puissances (États-Unis, Japon, Chine, Italie) qui se sont implantées, engendrant une perte d'influence relative de la France. Cette dernière a conservé une image de protecteur du pays, dont les autres partenaires ne bénéficient pas, mais cette image a en même temps été assombrie par un sentiment de désengagement militaire, politique et économique. Ainsi la politique d'économie budgétaire dans le domaine de la Défense envisagée en 2013 et le départ de la Légion étrangère, transférée dans les Émirats arabes unis en 2011, ont laissé des traces.

Diplomatie, avril-mai 2018

(1) Opérations militaires extérieures de la France, respectivement au Sahel, en Irak et en Syrie.

Comment la France est-elle devenue indésirable au Sahel ?
Après le Mali et le Burkina Faso, l’armée française a quitté le Niger. Un coup d’Etat après l’autre, la France est sommée de plier bagages au Sahel. Une présence militaire dénoncée depuis plusieurs années par les populations de cette région d’Afrique. L’opération militaire française « Barkhane », qui visait à lutter contre la menace djihadiste au Sahel, a quant à elle officiellement été arrêtée par Emmanuel Macron en novembre 2022.En remplacement de la France, de nouveaux acteurs s’invitent dans les activités sahéliennes : la Russie, notamment par l’entremise du groupe paramilitaire Wagner, mais aussi la Chine ou encore la Turquie. Ce virage diplomatique est profond et semble parti pour durer.Car le rejet n’est pas que militaire, il est aussi politique et économique. Au coeur des griefs à l’égard de la France, on compte entre autres le positionnement français à géométrie variable vis-à-vis des régimes en place, l’image du franc CFA et à sa symbolique néocolonialiste, la politique d’aide au développement jugée paternaliste...
Original link
Au Sahel, la France poussée dehors
Au-delà du Mali, la présence française est de plus en plus vertement remise en cause, dans un contexte marqué par la recrudescence de putschs militaires.Au Mali et au Burkina Faso, le pourrissement de la situation sécuritaire a délégitimé les régimes d'Ibrahim Boubacar Keïta (récemment décédé, il avait été renversé en août 2020) et de Roch Marc Christian Kaboré (qui vient d'être renversé à son tour).Incapables de faire face à la poussée des groupes armés et à la multiplication des massacres malgré leurs appuis étrangers, ces régimes sont devenus impopulaires. Leur chute rend la politique française intenable.

Le temps des colonels

(…). Au Sahel, plus la situation sécuritaire se détériore, plus la tension entre autorités civiles et militaires s'accroît et plus les militaires vont être tentés de prendre le pouvoir avec – et c'est une nouveauté de taille – l'assentiment de la rue.Il faut, en effet, se rappeler qu'en 2014 c'était la rue qui avait mis fin aux vingt-sept ans de règne de Blaise Compaoré et qu'elle n'a pas bougé pour Roch Marc Christian Kaboré, écarté par un coup d'État pacifique en plein second mandat comme son homologue malien. Ces putschs acceptés, voire célébrés, sont le
reflet de la désaffection populaire pour les régimes en place. Les élections n'ayant pas produit de gouvernements capables de résoudre les conflits, les coups d'État sont devenus au Sahel une méthode acceptable d'alternance pour la population – tant qu'ils sont pacifiques (…)Bien qu'il incarne à sa façon la revanche des cadets et la demande de renouvellement générationnel (en Guinée, au Mali et au Burkina Faso, tous les putschistes ont la quarantaine), le régime des colonels a peu de chances de résoudre la crise sécuritaire en cours, mais il pose un sérieux problème pour l'intervention militaire française au Sahel.
L'opération Barkhane n'a déjà plus aucune légitimité populaire, comme le montrent le suivi des réseaux sociaux, les manifestations antifrançaises dans les capitales de la région et la saga du convoi militaire français à la fin de l'année passée.Bloqué par les manifestants au Burkina Faso, ce convoi, qui se rendait au Mali, a dû rebrousser chemin et une autre confrontation avec la foule au Niger a abouti à trois morts parmi les manifestants. Les manifestations profrançaises qui avaient célébré l'opération Serval en 2013 se sont transformées en manifestations antifrançaises avec Barkhane.

La délégitimation politique de la présence française

À cette perte de légitimité populaire de Barkhane, les putschs ajoutent la perte de légitimité politique.D'une part, l'engagement militaire français aux côtés des putschistes à lunettes noires va contredire la défense de la démocratie régulièrement invoquée par Paris et mettre une fois de plus le gouvernement français en porte-à-faux avec ses
principes affichés. D'autre part, les putschistes de Ouagadougou risquent d'être tentés de suivre l'exemple de leurs homologues de Bamako qui remettent en cause la relation avec la France et entendent la remplacer par la Russie.En effet, les militaires burkinabés font face aux mêmes défis : une population en demande de sécurité, de très faibles capacités de combat, des divisions internes et une francophobie populaire. Dans ces circonstances, les putschistes burkinabés vont rechercher d'autres partenariats de sécurité (le groupe Wagner est en embuscade) et être tentés d'exploiter le capital politique que représente le rejet de l'intervention militaire française dans l'opinion publique locale. Et ce, d'autant plus que l'horizon est très nuageux.

Le pire est à venir

Le Sahel étant entré dans la saison des putschs, un peu de prospective s'impose. À l'instar des pouvoirs civils, les juntes risquent de se révéler incapables d'inverser la dynamique régionale d'insécurité et d'agir sur la cause profonde de cette crise régionale : la mauvaise gouvernance et sa conséquence, le délitement silencieux des États.Les métastases maliennes ont gagné le nord du Burkina Faso et l'ouest du Niger et risquent de contaminer les pays côtiers (nord de la Côte d'Ivoire, du Bénin, du Togo, etc.) qui, inquiets de cette perspective, ont lancé l'initiative d'Accra.
L'appui de la Russie, et éventuellement d'autres acteurs étrangers, ne suffira pas à résoudre une guerre faite de multiples conflits sur un vaste territoire (…)La rue étant versatile, si les juntes malienne et burkinabée n'améliorent pas la situation sécuritaire, elles seront rapidement discréditées et, à terme, elles feront le lit de l'islamisme populaire qui gagne déjà du terrain au Mali.Face aux condamnations diplomatiques, les régimes putschistes vont se solidariser et le front uni de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cedeao), qui a imposé des sanctions au Mali, se fissure déjà. Suspendue de la Cedeao, la Guinée du colonel Doumbouya a déjà annoncé qu'elle n'appliquerait pas les sanctions de la Cedeao contre le Mali (frontière ouverte, mise en place d'un vol Bamako-Conakry, etc.). Cette organisation régionale va être mise à rude épreuve par la multiplication des putschs.Enfin, l'hostilité à l'intervention militaire française est loin d'être limitée au Mali. Le convoi militaire français a été bloqué par la population au Niger et au Burkina Faso ; les syndicats nigériens demandent le départ des militaires français ; des drapeaux français ont été brûlés dans la capitale burkinabée à l'annonce du putsch et, même au Tchad, considéré comme le meilleur allié de la France dans la région, l'hostilité populaire est forte. Outre leur ressentiment historique, les opinions publiques sahéliennes voient que, depuis plusieurs années, les « succès tactiques » de Barkhane se traduisent par plus d'insécurité, d'exactions et de déplacés.

À la recherche d'une porte de sortie

Pris entre la contagion putschiste, la menace islamiste et l'hostilité à sa diplomatie militaire, le gouvernement français a conçu une stratégie de sortie qui est aujourd'hui caduque. Elle reposait sur :
  • la réopérationalisation de l'armée malienne, avec laquelle le divorce est maintenant consommé ;
  • une coalition militaire régionale (le G5 Sahel), créée en 2017, dont l'efficacité reste toujours à prouver ;
  • l'européanisation de la formation et de l'appui aux armées sahéliennes (la mission EUTM et la task force Takuba), rejetée par la junte malienne.
Actuellement, l'absence de stratégie de sortie et la paralysie de l'exécutif français en période électorale font planer des scénarios inquiétants :
  • la montée en puissance des manifestations antifrançaises, qui peuvent aboutir à des heurts, voire des bavures, impliquant les forces françaises ;
  • des attaques répétées des groupes terroristes contre les militaires et intérêts français ;
  • après le Mali, la remise en cause du partenariat sécuritaire avec le Burkina Faso et peut-être d'autres pays.
Alors que le Mali, qui est l'épicentre de la crise sécuritaire régionale, sonne la fin de l'intervention militaire française, l'urgence n'est plus de reconfigurer Barkhane ou de définir des lignes rouges pour négocier avec les groupes armés islamistes, mais de sortir du bourbier sahélien avant d'être tout simplement mis à la porte.
Article de Thierry Vircoulon*, publié dans Le Point, 03 février 2022

* Thierry Vircoulon est le coordinateur de l'Observatoire pour l'Afrique centrale et australe de l'Institut français des relations internationales, membre du groupe de recherche sur l'eugénisme et le racisme, université de Paris.