H7 Les expositions universelles
THEME 3 :
LA TROISIEME REPUBLIQUE AVANT 1914 : UN REGIME DEMOCRAITQUE, UN EMPIRE COLONIAL

Chapitre 8 :
Permanences et mutations de la société française jusqu'en 1914

Discours d'ouverture de l'Exposition universelle de 1889

Messieurs,

Aujourd’hui, nous venons contempler dans son éclat et dans sa splendeur l’œuvre enfantée par ce siècle de labeur et de progrès. Nous venons saluer les travailleurs du monde entier qui ont apporté ici le fruit de leurs efforts et les productions de leur génie (…). Nous venons souhaiter la bienvenue aux visiteurs qui, déjà de tous les points de l'horizon, en deçà ou au-delà des frontières, arrivent, sans compter les distances, pour prendre part à nos fêtes (…). Notre chère France est digne d'attirer à elle l’élite des peuples. Elle a le droit d'être fière d'elle-même, et de célébrer, la tête haute, le centenaire économique comme le centenaire politique de 1789 (…). Elle a trouvé dans ses institutions la force de vivifier le travail, de ranimer l'activité du commerce et de l'industrie, de rendre courage à l'agriculture atteinte par de redoutables fléaux (…). On ne saurait mieux le faire que par cet admirable concours des peuples qui, venus de toutes les parties du monde, se donnent rendez-vous pour rassembler les merveilles de l'industrie et les splendeurs de l'art de notre époque.

Discours prononcé le 6 mai au pied de la tour Eiffel par le président de la République Sadi Carnot pour l'ouverture de l'Exposition universelle de 1889, Petit Journal, 8 mai 1889

Zoos humains et village nègre
L'Exposition sert aussi à montrer l'étendue de l'empire colonial. Les indigènes sont exposés aux regards curieux des Européens, comme dans de véritables zoos humains.
Du Sénégal, M. Noirot nous a amené un contingent de nègres indigènes (...). Parmi eux figure un jeune homme de 17 ans, fils d'un chef. Ce jeune nègre est un beau type de sa race : il est intelligent, parle convenablement le français, non à la manière des nègres dégénérés de l'Amérique (...). Il parait comprendre et apprécier notre civilisation et s'est approprié quelques-uns de ces éléments pour en faire bénéficier ses compatriotes. Les Sénégalais ont construit un village complet, peuplé d'une trentaine d'habitants, hommes, femmes et enfants (...). Il y a dans cette partie de l'Exposition un sujet d'études très curieux et de comparaisons instructives pour le visiteur qui, se souvenant de ses lectures de relation de voyage, observera avec soin les différents types offerts à sa curiosité.
Article du journal Le Constitutionnel, 21 mai 1889
Souvenirs de l'Exposition universelle de Paris, affiche attribuée à Gustave Donjean, 1889, Musée d'Orsay, Paris
"Jette Progrès ta semence féconde
Dans les champs de l'humanité
Pour la faire germer resplendit sur le monde
Le soleil de la Liberté"
 

Un bilan de l'Exposition de 1889

On a calculé que plus de 6 millions de personnes étrangères à Paris avaient visité l'Exposition et on a essayé de faire une moyenne des dépenses de chacun : on a supposé que les 1 500 000 étrangers avaient pu dépenser 500 francs chacun, soit 750 millions ; les provinciaux, 100 francs en moyenne, soit 4 à 500 millions, soit au total, 1250 millions (…). Mais, au-dessus de ces millions gagnés et de ces profits matériels, aussi importants qu'ils soient, une richesse plus précieuse encore, richesse incalculable, reste acquise à la France : c'est le profit moral qu'elle a retiré, la renommée et l'honneur qu'elle a acquis en entreprenant et en réussissant une œuvre aussi considérable (…). En définitive, la France n'a rien perdu de sa grandeur : frappée durement, elle a mûri à l'école de la diversité, et elle vient de prouver qu'il ne faut jamais désespérer d'elle puisque ses enfants sont capables de tels efforts.

Alfred Neymark, « Ce que la France a gagné à l'Exposition de 1889 »,Journal de la société statistique de Paris, 1890
L'Exposition de 1900, un ode à la paix
Au lendemain de l'ouverture de l'Exposition de 1900 par le président Loubet, un collectif d'auteurs du Petit Parisien relate le rôle des Expositions universelles pour la France.
« L'Exposition de 1889 fut la fête de la République. […] Nos richesses industrielles et commerciales étaient retrouvées, nos finances rétablies, nos forces militaires reconstituées. […] Les visites impériales et royales prouvaient que notre patrie n'avait rien perdu de son aimantation irrésistible, et en venant à elle les souverains reconnaissaient que la République était le gouvernement définitif que la France s'était librement donné. […]
La France veut, par celle qui s'ouvre aujourd'hui, justifier la magnifique prophétie de Michelet : “Au XXe siècle, Paris déclarera la paix au monde !”. Plus qu'aucune autre nation, la France a connu les triomphes des champs de bataille. […] Alors que ce siècle s'achève, elle proclame la trêve du travail, du progrès, de la civilisation. […] L'Exposition de 1900 couronne le XIXe siècle par l'apothéose de la Paix. »
Jean Frollo (pseudonyme collectif), « Les trois étapes », Le Petit Parisien, 15 avril 1900.

L'Exposition universelle de 1900 célèbre le progrès

Le XIXème siècle a été le grand siècle du progrès. Pour fêter les prodiges des Arts et des Sciences, de l'Industrie de l'Agriculture, la France invita toutes les nations à participer à l'Exposition universelle qu'elle organisait à Paris. Toutes répondirent à cette invitation ; elles tenaient à comparer les progrès de leurs industries avec ceux des autres nations.

L'Exposition de 1900 fut une merveille. Le Champ-de-Mars avec son château et ses fontaines lumineuses qui, le soir, transformaient cette partie de l'Exposition en une véritable féerie, les quais de la rive gauche de la Seine, du pont Alexandre III au pont au pont d'Iéna, étaient occupés par les palais des nations, chacun dans son architecture nationale (…). Toutes ces constructions constituaient un ensemble riche et pittoresque et représentaient un travail formidable qui retenait l'attention des visiteurs. Jamais, à aucune époque de l'histoire, le travail n'a été autant glorifié que pendant l'année 1900.

Jeanne Bouvier, Mes mémoires, une syndicaliste féministe, 1876-1935