Problématique générale : En quoi la religion en Inde est-elle un facteur à la fois d’unité et de division ?
Objectif méthodologique : travail de la dissertation
Les émeutes anti-sikhs de 1984
En Inde, un verdict historique a été prononcé ce lundi [17 décembre 2018], condamnant pour la première fois un membre du parti du Congrès pour son rôle dans les pogroms contre la communauté sikhe en 1984. Les violences instiguées par le parti de la dynastie Nehru-Gandhi envers cette minorité religieuse avaient fait près de 3000 morts à New Delhi (…). La condamnation à la réclusion à perpétuité pour l'ancien député du Congrès Sajjan Kumar survient plus de 34 ans après les violences, pour lesquelles aucun haut responsable politique n'avait été jusqu’à présent condamné. M. Kumar a été reconnu coupable d'avoir incité les foules à massacrer les membres de la communauté sikhe à New Delhi, au lendemain de l'assassinat d'Indira Gandhi, le 31 octobre 1984. La Première ministre indienne avait été abattue par ses propres gardes du corps sikhs, en représailles à l'assaut militaire lancé contre le temple d'or d'Amritsar, lieu sacré du sikhisme, afin d'en déloger les militants séparatistes.
Antoine Guinard, « L’Inde : perpétuité pour un ex-parlementaire après les pogroms anti-sikhs de 1984 », www.fri.fr, 17 décembre 2018
La Constitution et les minorités religieuses
En reconnaissant des minorités religieuses avec leurs droits particuliers, la Constitution indienne reconnaît en même temps, de façon implicite, la majorité hindoue (…). Aucun Parlement n'a cependant osé toucher aux droits civiques des minorités sans leur consentement préalable. Dans le cadre d'un divorce qui concerne un couple musulman (1985), la Cour suprême a tranché en faveur de la femme pour l'attribution d'une pension, allant ainsi à l'encontre de la loi islamique prévalente. Le Parlement de l'époque se dépêcha de voter une loi spéciale, protégeant la loi musulmane civique (…). La Constitution indienne suggère que l'Etat devrait évoluer vers un droit civique uniforme, mais jusqu’à présent, ces recommandations sont restées lettre morte. Les minorités se sont opposées à toute tentative en ce sens, craignant que la majorité hindoue n'impose sa propre loi.
Michael Amaladoss, « Inde, quelle laïcité ?, Etudes, 2 004
L'interdiction du vin de messe dans le Kerala
Avec plus de 20% de chrétiens, l’État du Kerala, dans le sud de l'Inde, se distingue des 28 autres États de la fédération indienne. L'actuel Premier ministre du Kerala, Oommen Chandy, 71 ans, est d'ailleurs issu d'une famille syriaque-orthodoxe. Mais cela ne l'a pas empêché de céder aux pressions des milieux hindouistes pour décréter, début août, que la consommation, la production et la vente d'alcool seraient interdites dans tout le Kerala (…).
On évoque la possibilité que des « licences spéciales » soient délivrées à certaines Eglises pour leur permettre de fabriquer leur propre vin de messe. Mais des fondamentalistes hindouistes ont déjà fait savoir qu'ils allaient demander au gouvernement du Kerala d'annuler ces permis, arguant que les Eglises ne peuvent s'élever au-dessus de la loi.
La Croix, 28 août 2014
La persécution des chrétiens en Inde
Dans l'hindouisme, les vaches sont sacrées : elles sont le symbole de la vie universelle, le véhicule des dieux Shiva et Krishna. Sa consommation est interdite par les hindous : seuls les « impurs » (dalit) peuvent en manger.
Au niveau national, selon Persecution Relief, un forum œcuménique contre les persécutions antichrétiennes, 736 attaques ont été enregistrées en 2017 contre 348 en 2016. De tels incidents ont été signalés dans 24 des 29 Etats de l'Inde (…). En avril 2018, la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse internationale (USCIRF) a estimé que la liberté religieuse en Inde suivait une tendance négative. En plus des violences antichrétiennes, l’USCIRF a signalé des incidents, parfois mortels, liés à l'abattage des bovins. Les mesures visant à protéger les vaches sont en augmentation : au Rajasthan, un « Ministère de la vache » a été institué, et les lois contre l'abattage des bovins ont été renforcées. Par ailleurs, dans l'Etat du Gujarat, l’Etat dont est originaire le Premier ministre, Narendra Modi, la sanction pour l'abattage illégal de vaches est passée de 7 ans à la réclusion à perpétuité (…). La consommation de bœuf est devenue un motif récurrent de la violence entre les extrémistes hindous et les membres des minorités. Pour les musulmans et les chrétiens, ainsi que pour la population tribale indienne et les dalits [intouchables], le bœuf est une source de protéines bon marché, mais cela leur fait craindre des raids des milices pro-hindoues qui attaquent les éleveurs, les transporteurs et les vendeurs de bétail.
Observateur de la liberté religieuse, rapport 2018
Les lois anti-conversion
Malgré les lois fédérales anti-discriminations, l'hindouisme induit de fortes inégalités sociales, qui motivent en partie les conversions à d'autres religions.
Récemment, les ministres membres du BJP se sont exprimés en faveur de mesures visant à « protéger la religion hindoue », apparemment menacée par la montée des minorités religieuses, musulmanes et chrétiennes en particulier. En décembre 2014, le ministre des Affaires parlementaires a fait sensation en appelant à une législation anti-conversion au niveau fédéral (…). Toutefois, en avril 2015, le Ministère fédéral de la Justice a émis un avis négatif sur la matière, au motif qu’une loi fédérale serait inconstitutionnelle. Aujourd'hui, sur le 29 Etats de l'Union indienne, 8 ont adopté une loi anti-conversion.
Observatoire de la liberté religieuse, rapport 2018