Michel-Ange et la chapelle Sixtine
En 1508, le pape Jules II charge Michel-Ange d'orner l'immense plafond de la chapelle Sixtine avec des scènes de la Genèse. Cet artiste complet, aussi poète et architecte, rival de Léonard de Vinci, est alors surtout réputé comme sculpteur. Travailleur acharné et solitaire, il met trois ans à achever l’œuvre. De 1536 à 1541, il reprend ses pinceaux pour réaliser sur le mur oriental de la chapelle, la fresque du Jugement dernier. L'ensemble d'un caractère novateur, suscite des réactions contrastées.
Des questions coup de pouce qui peuvent vous aider à mieux cerner le sujet :
1) Où se situe la chapelle Sixtine ? Qui est le commanditaire ?
2) Quel est le passé artistique de Michel-Ange avant qu’il ne peigne la chapelle Sixtine ? Dans quel art excelle-t-il ?
3) Relevez les difficultés rencontrées par l’artiste pour réaliser les fresques.
4) Décrivez la manière dont l’artiste représente les corps des personnages. Quelle vision de l’être humain Michel-Ange donne-t-il par cette œuvre ?
5) Démontrez pourquoi cette fresque est une œuvre chrétienne qui s’inscrit pleinement dans la Renaissance ?
6) Montrez les critique qui ont pu être faites sur l’œuvre de Michel-Ange.
Vidéo présentant la constuction de la chapelle Sixtine par Michel-Age
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Michel-Ange vu par Giorgio Vasari

Le peintre et architecte Giorgio Vasari 1511-1574 set le premier à rédiger des biographies d'artistes en 1550. Contemporain de Michel-Ange, il assiste à la transformation du statut de l'artisan celui d'artiste.

Le Maître des cieux se décida à envoyer sur la Terre un génie qui fut universel dans tous les arts et dans tous les métiers et qui montrât par lui seul quelle chose est la perfection de l'art du dessin, tant pour esquisser, faire les contours, les ombres et les lumières, donner du relief aux choses de la peinture, introduire un jugement droit dans les procédés de la sculpture, enfin, en architecture rendre les habitations commodes et sûres, agréables, bien proportionnées et riches dans les ornements variés. Il tint à,lui donner pour patrie Florence, comme la plus digne des cités (…). Son mérite a été reconnu pendant sa vie, et non après sa mort, comme il arrive à bien d'autres ; puisque Jules II, Léon X, Clément VII, Paul III, Jules III, Paul IV et Pie V, souverains pontifes [papes], ont toujours voulu l'avoir auprès d'eux ; comme on sait Soliman, empereur des Turcs ; François de Valois, roi de France ; Charles Quint, empereur, et la Seigneurie de Venise et finalement le duc Cosme de Médicis l’ont recherché et lui ont fait des offres avantageuses, rien que pour se prévaloir de son grand talent, ce qui n'arrive qu’aux hommes de haute valeur comme lui.

Giorgio Vasari, Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes, 1550. Réédition 1568, trad. I. Leclanché et C. Weiss, « Les cahiers rouges », Grasset, 2 007

Vatican 2 la chapelle Sixtine
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Une commande stimulée par la jalousie des artistes

Pendant que Michel-Ange était retenu à Bologne (…), le Bramante (1), de concert avec Raphaël d’Urbino (2), profita de son absence pur conseiller à Jules II d’abandonner le projet de son tombeau (…) [et] persuadèrent donc le pape de forcer Michel-Ange à peindre la chapelle du palais, bâtie par son oncle Sixte IV. Bramante et les autres envieux de notre artiste voulaient le réduire au désespoir, en lui enlevant ses travaux de sculpture qui l’immortalisaient, pour le contraindre à entreprendre un genre de peinture où il devait se montrer inférieur à Raphaël, puisqu’il n’avait pas encore l’occasion de la pratiquer (…). Michel-Ange (…) employa en vain toutes les raisons plausibles pour se dispenser d’accepter une entreprise dont il
connaissait toutes les difficultés. Il alléguait sn ignorance de la fresque et de la pratique des couleurs, pour renvoyer l’ouvrage à Raphaël ; mais tout cela ne servit qu’à aiguillonner davantage le désir de Jules II, dont les volontés étaient inflexibles (…). Michel-Ange, voyant donc qu’il ne pouvait plus résister sans exciter la colère du pape, dont le caractère était extrêmement violent, résolut d’obéir.

Giorgio Vasari, Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, 1550

1. Architecte (1444-1514) au service de Milan puis du pape à partir de 1504
2. Peintre (1483-1520) au service de Florence puis du pape à partir de 1508
Chapelle Sixtine visite virtuelle : écrire la bande son
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Schéma explicatif de la peinture de la voûte
 
Vue partielle de la voûte de la Chapelle Sixtine
Musée du Vatican, Rome
Au centre de 1 à 7, des scènes de l'Ancien Testament (la Genèse).
En A, les Sibylles (prophétesses de l'Antiquité) et les Prophètes de l'Ancien Testament ayant annoncé la venue d'un Messie.
En B, les ancêtres de Jésus-Christ, d'après le Nouveau Testament
 
La sibylle de Libye
Détail de la voute de la Chapelle Sixtine

Dans la mythologie grecque, une sibylle est un prêtresse d'Apollon dotée du pouvoir de divination
 
Un modèle antique
Torse du Belvédère, Ier siècle av. J.C., musées du Vatican, Rome, découvert en 1432 à Rome
 
Détail de la voûte de la Chapelle Sixtine
Palais du Vatican, Rome
 

Un sonnet de Michel-Ange

Dans ce sonnet, Michel-Ange évoque la peinture du plafond vers 1510

A travailler tordu, j'ai attrapé un goitre

Comme l'eau en provoque aux chats de Lombardie

( à moins que ce ne soit de quelques autres pays)

Et j'ai le ventre, à force, collé au menton

La barbe pointe vers le ciel, je sens ma nuque

Sur mon dos, j’ai une poitrine de harpie

Et la peinture qui dégouline sans cesse

Sur mon visage en fait un riche pavement

Mes lombes (1) sont allées se fourrer dans ma panse

Faisant par contrepoids de mon cul une croupe

Chevaline et je déambule à l'aveuglette (…)

Extrait d'un sonnet de Michel-Ange, cité dans Poèmes, éditions NRF poésie, Gallimard

(1) Lombaires

Croquis de Michel-Ange (décembre 1508)
Sur ce croquis, Michel-Ange se représente en train de peindre le plafond de la chapelle
 
[1 minute, 1 oeuvre] Le Jugement Dernier de Michel-Ange
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Une critique du Jugement dernier au nom de la bienséance

Lors de ma dernière vision générale de votre Jugement, j'ai retrouvé l’illustre grâce de Raphaël dans la beauté de l'invention. Cependant, comme baptisé, j'ai honte de la licence, si illicite à l'esprit, que vous avez prise dans l'expression des aspirations de notre vraie foi (…). Vous, traitant d'un sujet si élevé, vous montrez les anges et les saints, ceux-ci dépourvus de toute honnêteté terrestre et ceux-là privés de tout ornement céleste. Voyez les païens : sans parler de Diane, qu’ils sculptent habillée, lorsqu'ils modèlent Vénus nue ils lui font couvrir de sa main les parties à ne pas découvrir ; alors que vous, qui pourtant être chrétien, attachant plus de prix à votre art qu’à votre foi, vous tenez pour conforme à la vérité du spectacle (…) le geste du damné saisi par les organes génitaux, chose qui, pour ne pas la voir, ferait fermer les yeux au bordel lui-même. Votre travail aurait eu sa place parmi les délices d'un établissement de bains, non dans un cadre sublime. Aussi serait-ce un moindre vice que vous n'ayez pas la foi, plutôt que d'entamer la foi d'autrui en exprimant la vôtre de la sorte.

Pietro Aretino dit l’Arétin, Lettre de Venise, novembre 1545, trad. A.C. Fiorato