Doc 3 : Pourquoi la France entre en guerre
Louis XIII et Richelieu mènent, en France, une politique hostile aux protestants. Ils prennent La Rochelle et les autres places fortes protestantes concédées dans l'édit de Nantes. À l'étranger, cependant, ils entrent en guerre pour des raisons qui ne sont pas liées à la religion. En 1635, la France entre dans la guerre de Trente ans. Louis XIII et son principal ministre Richelieu veulent lutter contre la famille des Habsbourg qui dirigent des pays frontaliers : l'Espagne et le Saint-Empire. Au nom de la raison d’État, selon laquelle pour se protéger un pays peut enfreindre ses propres principes, la France soutient des États protestants engagés dans ce conflit.
Maintenant que La Rochelle est prise, si le Roi veut se rendre le plus puissant monarque du monde et le prince le plus estimé, il doit considérer devant Dieu, et examiner soigneusement et secrètement, avec ses fidèles créatures, ce qui est à désirer en sa personne et ce qu'il y a à réformer en son État (…).
Pour le dehors, il faut avoir un dessein perpétuel d’arrêter le cours des progrès d’Espagne, et au lieu que (1) cette nation a pour but d'augmenter sa domination et étendre ses limites, la France doit penser qu'à se fortifier en elle-même (…).
Pour cet effet, la première chose qu'il faut faire est de se rendre puissant sur la mer, qui donne entrée à tous les États du monde. Ensuite, il faut penser à se fortifier à Metz, et [à] s’avancer jusqu’à Strasbourg, s'il est possible, pour acquérir une entrée dans l'Allemagne (2).
Richelieu, « Avis au roi après la prise de La Rochelle pour le bien de ses affaires », Lettre à Louis XIII, 1629
1. Alors queDoc 7 : La guerre de Trente ans, un fléau pour les Français
Prêtre du diocèse de Limoges, Pierre Vacherie note dans son journal ses impressions sur le règne de Louis XIII quand il apprend sa mort.
La guerre continuelle avec l'Espagne a produit mille monstres difformes qu'on appelle partisans (1), qui ont tout pillé par (…) les impôts (…) saignant à blanc le pauvre peuple qui a eu et a encore plus de charges que tout son revenu ne vaut (…). L'autre malheur qui a poursuivi le peuple a été le continuel, ou du moins le fréquent, logement des soldats impitoyables chez les paysans avec tant d'insolence que les Turcs n’eussent pas été si cruels ; ils tuaient, pillaient, brûlaient, violaient, découvraient les maisons, rançonnaient, …, sans que personne y mît ordre. Il y avait dans chaque province un ou deux commissaires ou intendants ayant autant de pouvoir que le roi même (2) (…) ; mais c'était seulement pour piller, et non pour soulager les provinces (…) ; aussi tient-on que durant ce règne de sang, de fer et de cruauté, on a exigé plus de sommes sur les peuples de France qu'il ne s'en était levé depuis l'érection de la monarchie (…).
Pierre Vacherie, Journal, 20 mais 1643
1. FinanciersDoc 8 : Fénelon : la critique de la guerre
Dans cette lettre au roi (jamais lue), Fénelon se fait l'écho d'un mécontentement croissant.
Votre peuple, que vous devriez aimer comme vos enfants, et qui ont été jusqu'ici si passionnés par vous, meurent de faim. La culture des terres est presque abandonnée ; les villes et les campagnes se dépeuplent ; tous les métiers languissent et ne nourrissent plus les ouvriers. Tout commerce est anéanti. Par conséquent, vous avez détruit la moitié des forces réelles du dedans de votre État, pour faire et pour défendre de vaines conquêtes au dehors (…).
Le peuple même (il faut tout dire) qui vous a tant aimé, qui a eu tant de confiance en vous, commence à perdre l'amitié, la confiance et même le respect. Vos victoires et vos conquêtes ne le réjouissent plus ; il est plein d'aigreur et de désespoir. La sédition (1) s’allume peu à peu de toutes parts. Il croit que vous n'avez aucune pitié de ces maux, que vous n'aimez que votre autorité et votre gloire. Si le roi, dit-on, avait un cœur de père pour son peuple, ne mettrait-il pas plutôt sa gloire à leur donner du pain qu’à garder quelques places de la frontière qui causent la guerre ? Quelle réponse à cela, Sire ?
Fénelon,Lettre à Louis XIV, 1693
1. La révolte