La chose est connue, elle a même été théorisée, notamment par Thomas Hobbes (1) : l’existence d’une loi ne suffit pas pour que celle-ci soit respectée. Pour ce faire, il faut que la perspective d’un déplaisir l’emporte sur la perspective du plaisir. Autrement dit, il faut que la menace de la sanction me fasse réfléchir à deux fois avant de commettre l’infraction. Ce pouvoir de coercition, pour être efficace, doit être appliqué, afin de montrer l’exemple (d’où les appels à « la fermeté » et à « l’autorité » de l’État). Et il ne doit pas être partagé : l’Etat est « détenteur du monopole de la violence physique légitime », selon la formule de Max Weber (2). Les deux éléments sont essentiels : il faut qu’il y ait monopole, sinon un système de régulation parallèle peut exister et mettre en péril la société (c’est le cas avec la mafia ou les cartels) ; mais il faut aussi que cette violence soit légitime. Et là est le problème, comme j’ai déjà eu l’occasion d’en parler : sur quoi se fonde cette légitimité ? […]
Thomas Schauder, « Black blocs, qu’est-ce que la violence légitime ? »,
LeMonde.fr, 9 mai 2018.
1. Thomas Hobbes (1588-1679), philosophe anglais qui théorise dans le Léviathan le principe d’un État terrifiant, forçant les hommes à respecter la loi par la peur de la punition.
2. Max Weber (1864-1920), philosophe et sociologue allemand.